À Cannes, la Semaine de la critique sacre Tiger Stripes, un film malaisien sur la puberté


En pleine puberté, Zaffran réalise que son corps se transforme à une vitesse inquiétante. GHOST GRRRL PICTURES

Mêlant comédie adolescente et horreur, ce récit d’émancipation suit une poignée d’adolescentes d’une petite communauté rurale.

Un an après avoir couronné Aftersun de Charlotte Wells, un délicat et trompeur récit de vacances interrogeant la figure d’un père trop vite disparu, la Semaine de la critique, dédiée en marge du Festival de Cannes aux premiers et seconds films, est restée au chevet de la jeunesse et de ses interrogations. Le jury, présidé par la réalisatrice française Audrey Diwan (L’Évènement, lion d’or à Venise), a attribué mercredi son Grand prix à la Malaisienne Amanda Nell Eu pour Tiger Stripes, un film sur la puberté mêlant comédie adolescente et horreur.

Récit d’émancipation, le film suit Zaffan, 12 ans, qui vit dans une petite communauté rurale de Malaisie. Elle voit son corps se transformer à une vitesse inquiétante. Luttant pour rester normale à l’école, Zaffan tente de cacher «son moi grotesque». Mais bientôt cela n’est plus possible, et elle est humiliée devant toute sa classe. Ses amies se détournent d’elle lorsqu’une crise d’hystérie collective frappe l’école. La peur se répand et un médecin intervient pour chasser le démon qui hante les filles. «Zaffan est contrainte à un exorcisme impliquant des méthodes extrêmes de honte et de torture. Et comme un tigre qui a été traîné hors de son habitat et piqué parce que nous le craignons, parce que nous ne le connaissons pas, Zaffan se lève finalement et décide de révéler à tout le monde ce qu’elle a caché – sa vraie nature, sa colère, sa rage et sa beauté», précise le synopsis.

L’influence des contes et légendes traditionnels

Parfois gore, Tiger Stripes s’est attiré des comparaisons avec Grave de Julia Ducournau, découverte à la Semaine de la critique en 2016, puis récompensée de la Palme d’or en 2021 pour Titane. Ayant passé son adolescence en Angleterre, diplômée de la London Film School, Amanda Nell Eu dit s’être inspirée «des contes et légendes d’Asie du Sud-Est qui à travers leurs récits reflètent et commentent le patriarcat». «Dans Tiger Stripes, les adultes sont presque des caricatures. Enfant, je les voyais comme des figures d’autorité plutôt que des êtres humains», a confié à Variety la réalisatrice de 37 ans qui se souvient d’avoir «été terrifiée par son passage à la puberté et les non-dits et les sentiments de honte associés».

Tiger Stripes n’est pas le seul film sur l’adolescence à avoir été plébiscité par la Semaine de la critique. Le prix de la «French Touch» a été décerné à Il pleut dans la maison de la Belge Paloma Sermon-Daï, film sur un frère et une soeur livrés à eux-mêmes, le temps d’un été caniculaire.

La Fémis bien représentée

Dans le reste du palmarès, le jury a attribué le prix de la star montante de la Fondation Louis Roederer à Jovan Ginic pour Lost Country, du Serbe Vladimir Perisic, formé à la Fémis en France. Le film explore les relations entre Stefan, 15 ans, et sa mère, porte-parole du parti au pouvoir, lors de manifestations contre le régime de Milosevic en 1996.

Le Prix Fondation Gan à la diffusion, doté de 20.000 euros, a été remis à la société Pyramide, distributeur en France d’Inchallah un fils du Jordanien Amjad Al Rasheed. Le film raconte la lutte d’une femme contre une société où ne pas avoir un descendant mâle peut changer une vie.

Enfin, le prix SACD a été remis à la Française Iris Kaltenbäck, elle aussi formée à la Fémis, pour Le Ravissement, un film sur la solitude urbaine portée par Hafsia Herzi, en sage-femme parisienne prête à tout pour donner un sens à sa vie.


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