Au sein du black bloc, des membres aux profils divers, unis contre le « système », le capitalisme, la police et Macron


Sur le parcours de la manifestation du 1er-Mai 2023, à Lyon.

Tribunal judiciaire de Paris, mardi 9 mai. Ils sont une trentaine qui trépignent sur le parvis, porte de Clichy, derrière une banderole : « Liberté pour les enfermés. » A les voir là, en plein courant d’air, ils semblent plus désœuvrés que déterminés. Ils attendent la décision de la 23chambre correctionnelle qui statue sur le sort d’une dizaine de leurs camarades, interpellés lors de la manifestation du 1er-Mai, à la suite des heurts et des saccages commis place de la Nation, en marge du cortège intersyndical.

Henri (qui a souhaité rester anonyme, comme les autres personnes citées), 40 ans, est venu de l’Oise. « Pour soutenir nos frères », dit-il. Le 1er-Mai, il était dans le « groupe de tête ». Appellation contrôlée qui désigne le black bloc, sans le nommer. Là où se sont déchaînées les violences. C’est un habitué. Pas spécialement « marqué » idéologiquement – il ne se définit ni comme anarchiste ni comme autonome et encore moins d’extrême gauche –, il n’aime pas particulièrement ce terme : « Black bloc, ça ne veut rien dire. Noir, c’est juste parce que ce n’est pas distinctif. C’est le meilleur moyen de ne pas être identifié. On partage la même galère. »

Taille moyenne, gabarit plutôt modeste, cheveux aussi grisonnants que rares, l’homme n’a pas la physionomie d’un gros bras. Il parle posément, sans véhémence particulière. Il a grandi et vit dans l’Oise, où il élève seul son fils de 2 ans et demi, qu’il a confié pour la journée à ses parents. Longtemps, il a été éducateur, avant qu’une maladie ne le frappe, l’éloigne de son travail et de son club de football.

Un seul point commun

Danièle, qu’on rencontre le lendemain dans un bistrot trop bruyant du quartier de l’Opéra, n’a pas grand-chose en commun avec Henri. Sauf l’attrait pour le « groupe de tête » des manifs et la panoplie noire qui va avec. Danièle a de longs cheveux châtains et porte d’imposantes lunettes rectangulaires façon Yves Saint Laurent, qui barrent le haut de son visage. Un sac à main de cuir noir à l’épaule, elle arrive du quartier de La Défense (Hauts-de-Seine), où elle est cadre dans une société d’assurances. Elle a 38 ans. Elle est née et a grandi à Paris, qu’elle a quitté, il y a quelques années, pour le Val-d’Oise – « les loyers sont moins chers » –, où elle élève seule sa fille de 18 ans, laquelle suit des études dans une école de commerce. Si ce n’est la volonté de casser les devantures de banques et d’en découdre avec la police, rien ne rapproche Danièle d’Henri. Sauf cet engagement dans la contestation radicale et – peut-être – la passion du football…

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