Avec Isomorphic Labs, Google DeepMind veut « modéliser la biologie » grâce à l’IA


Isomorphic Labs n’est pas connue du grand public. Mais cette filiale d’Alphabet, la maison mère de Google, a de grandes ambitions : « améliorer la façon dont sont découverts les médicaments », et même ouvrir l’ère de la « biologie numérique », explique son directeur technique, Sergei Yakneen. Pour cela, la jeune société, créée fin 2021, compte s’appuyer sur « l’un des projets de recherche les plus marquants » de DeepMind, la filiale d’intelligence artificielle (IA) de Google : AlphaFold 2, qui, mi-2021, a réussi la modélisation en 3D des 200 millions de protéines connues.

DeepMind était déjà connue pour avoir battu le champion du monde de go avec AlphaGo, mais cette nouvelle publication a « secoué le monde scientifique », se rappelle M. Yakneen, qui, à l’époque, s’employait à utiliser l’IA pour améliorer le diagnostic du cancer, au sein de la société suisse Sophia Genetics. « Avant AlphaFold, il fallait quatre ou cinq ans à un thésard pour déterminer la structure d’une seule d’entre elles », insiste l’informaticien.

M. Yakneen, né en Sibérie soviétique, mais ayant émigré à l’adolescence au Canada, avec sa famille, partage aujourd’hui son temps entre les deux bureaux d’Isomorphic Labs, à Lausanne, en Suisse, et à Londres, au Royaume-Uni, dans un bâtiment voisin du siège de DeepMind. Signe de l’importance du projet, son directeur général est Demis Hassabis, fondateur de DeepMind et désormais directeur de toutes les équipes de recherche en IA du géant du numérique, regroupées dans l’entité Google DeepMind. « C’est un passionné de médecine », dit M. Yakneen.

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Prédire les formes des molécules, leur toxicité

Que font concrètement les cent employés de l’entreprise ? « Notre thèse est que nous pouvons représenter la biologie de façon numérique. Que nous pouvons construire des modèles qui nous aideront à comprendre les systèmes du vivant et, ensuite, de prédire et dessiner des éléments in silico, dans un ordinateur, plutôt qu’en utilisant des techniques classiques d’expérience en laboratoire, par des chimistes et des biologistes », explique M. Yakneen, qui a étudié au Canada auprès d’une sommité de l’IA, Geoffrey Hinton. Pour cela, AlphaFold n’est « qu’une pièce d’un puzzle bien plus vaste », explique-t-il. Isomorphic Labs s’emploie donc à créer des modèles qui répliquent les lois de la chimie, de la physique ou de la biologie, afin de tenter de prédire les formes des molécules, leurs interactions, leur toxicité, etc.

Cette « tâche incroyablement difficile » est loin d’être achevée, mais la société se félicite d’avoir, en octobre 2023, publié une nouvelle version d’AlphaFold, intégrant, outre les protéines, des éléments sur les acides nucléiques, l’ADN ou les « petites molécules » appelées ligands. La finalité n’est pas seulement d’accélérer les recherches sur les traitements et d’abaisser leurs coûts, mais de « faire des choses nouvelles », par exemple pour lutter contre des maladies incurables ou rares, précise M. Yakneen.

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