dans les villages du Loir-et-Cher, les facteurs multitâches se déploient


Marlène Thévenin sonne à la porte d’une maison d’un lotissement désuet de Saint-Gervais-la-Forêt (Loir-et-Cher), où le thuya est toujours roi. « Et là, j’appuie sur “commencer la prestation VSMP” », dit-elle en tapotant son Facteo, un smartphone qui lui sert d’assistant numérique. Mais personne n’ouvre. Deuxième tentative. Rien non plus. Le Facteo avait pourtant donné ses « consignes » : « Présentez-vous au bénéficiaire et échangez autour d’un sujet susceptible de l’intéresser ». Avec, au choix : « Quel temps ! », « Vous avez regardé la télé hier soir ? », « Vous avez reçu un peu de visite ? » On retentera plus tard.

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La VSMP – pour « Veiller sur mes parents » – est l’une des nombreuses prestations payantes qui font le quotidien de Marlène Thévenin, 26 ans, factrice dite « services expert », embauchée en mai 2022. Cette ancienne aide à domicile qui se rêvait ambulancière est entrée à La Poste par le biais de l’intérim, comme renfort pendant les fêtes de Noël de 2020. Son QG est le tri postal de Blois, immense barnum où chaque facteur prépare sa tournée en silence, avant de s’élancer dans les campagnes environnantes.

Tri du courrier sur la plate-forme de préparation et de distribution du courrier de Blois, le 20 janvier 2023.

Marlène est une factrice « rouleuse », qui seconde ses collègues « titulaires » : elle promène ainsi son Kangoo jaune entre Vineuil, Huisseau-sur-Cosson, Saint-Claude-de-Diray, Montlivault, Saint-Gervais-la-Forêt et une portion de Mont-près-Chambord. « On est une petite équipe pour une dizaine de tournées au total et on communique beaucoup entre nous et avec notre manageur », assure-t-elle, les yeux rivés sur son Facteo.

« On vend des prestas, mais on sait aussi être arrangeants »

Tôt ce matin-là, Marlène a disposé un casier orange sur le siège passager : sa tournée de courrier traditionnelle est composée de plis Yves Rocher à foison, de magazines sous blister, de quelques lettres administratives, d’une poignée de recommandés et d’une carte timbrée au motif du Nouvel An chinois. Elle a surtout lesté son coffre d’une vingtaine de colis, dont plusieurs cartons en provenance de la plate-forme Amazon d’Orléans. La jeune femme a déposé la plupart dans un « point pick-up », soit ici un drive de supermarché. L’employé Leclerc a flashé les colis d’un air morose, la postière a scanné le code QR de l’employé Leclerc et chacun est reparti de son côté.

La remise en main propre est une prestation facturée autour de 2 euros

Le temps presse. La tournée classique reprend. Dans les ruelles désertes, le courrier se distribue souvent de la vitre abaissée du conducteur, en roulant au ras des boîtes. La remise en main propre est une prestation facturée autour de 2 euros. « On peut aussi collecter le courrier ou les colis directement dans les boîtes aux lettres. Un service payant, accessible depuis le site Internet de La Poste ». Une vieille dame en pyjama s’approche en claudiquant, une lettre à la main. Marlène s’en saisit. « On vend des prestas, mais on sait aussi être arrangeants. »

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