des Kurdes dénoncent “des provocations” avant le second tour de la présidentielle



Plus de 60 millions d’électeurs sont appelés aux urnes dimanche 28 mai pour le second tour de la présidentielle en Turquie. L’opposant Kemal Kiliçdaroglu dispose d’une avance confortable dans les zones à majorité kurde, où la tension est montée d’un cran.

Un imposant véhicule blindé noir s’engage dans la ruelle où habite Ismet, à Cizre, ville kurde de proche de la frontière syrienne. Depuis le premier tour de l’élection présidentielle en Turquie, elle voit défiler sous ses fenêtres les patrouilles de la gendarmerie turque qui tirent des cartouches de gaz lacrymogène à la nuit tombée. “Un soir, j’ai ouvert la porte, et le gaz m’a coupé la respiration, mes yeux se sont fermés, j’ai cru que j’allais mourir. Ils nous causent des problèmes parce qu’on a voté pour Kemal Kiliçdaroglu”.

Le social-démocrate a obtenu 44,9% des suffrages au premier tour, le 14 mai 2023, derrière Recep Tayyip Erdoğan (49,5%) qui brigue un nouveau mandat. Mais Kemal Kiliçdaroglu a le soutien du HDP. Le principal parti pro-kurde appelle à faire barrage au président sortant. Ainsi, depuis deux semaines, la tension est montée dans le sud-est de la Turquie occupé en grande partie par les Kurdes. Les forces de sécurité turques ont renforcé leur présence dans certains fiefs. “Ils veulent intimider les gens pour qu’ils n’aillent pas voter”, dénonce Ismet avant de s’interrompre. Des coups de feu résonnent à quelques rues.

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Les autorités locales assurent que les récents troubles ont commencé lorsque de jeunes sympathisants du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, ont ouvert le feu, le soir du premier tour de l’élection présidentielle. Une version que dément Zindan, 23 ans, attablé dans un café sur les berges du fleuve Tigre. “Ils ont voulu faire croire aux gens que s’ils votent pour Kemal Kiliçdaroglu, il y aura des tensions dans la rue, des jets de projectiles, des tirs en l’air… C’est l’œuvre de provocateurs.”

Les plaies du passé

Au détour d’une rue, des impacts de balles sont encore visibles sur un mur. Ici, en 2015 et 2016, de terribles combats se sont déroulés en pleine ville. Hezni, mère de deux partisans du PKK, n’a jamais revu le visage ses enfants. “Huit ans ont passé et je suis toujours à la recherche du corps de ma fille. Celui de mon fils m’a été rendu sans sa tête. La guerre à Cizre n’était pas une guerre normale. Ils les ont brûlés vifs avec des armes chimiques. Nos enfants criaient : ‘Nous sommes là !’ J’entends encore leurs cris. Je sens encore l’odeur de la chair brûlée.”

Dimanche 28 mai, elle votera Kemal Kiliçdaroglu, même s’il se réclame du nationalisme turc. Mesut, responsable local du HDP, fait campagne pour le candidat de l’opposition ou plutôt contre le président sortant. “Est-ce que les Kurdes aiment Kiliçdaroglu ? Je vous jure qu’ils ne savent même pas qui c’est. Mais nous voulons le départ d’Erdoğan. Alors avons-nous une autre option ?” Le parti pro-kurde les habitants de Cizre à se rendre aux urnes dans le calme, malgré la tension qui règne en ville. 





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