des preuves de vie montrées à la famille



« C’est un miracle », s’émeut encore Elvira Ghergut. Quatre jours après la publication le 16 mars du récit de La Croix L’Hebdo sur son frère Iulian, retenu captif au Sahel depuis huit ans, un événement inespéré se produit : deux otages occidentaux sont libérés. Le premier, le journaliste français Olivier Dubois, avait été enlevé le 8 avril 2021 au Mali. Il était le dernier otage français au monde. Il est accompagné de Jeffery Woodke, humanitaire américain enlevé le 21 avril 2016 au Niger.

C’est ce dernier qui, dans une conférence de presse filmée fin mars, mentionne Iulian, enlevé le 4 avril 2015 au Burkina Faso par le groupe djihadiste Al-Mourabitoune dans la zone dite des trois frontières, jouxtant le Mali et le Niger. Le kidnapping de Iulian est alors le premier fait terroriste sur le territoire burkinabé. Il signe le début d’un long cycle de violence menant à l’effondrement du pays.

À l’époque, Iulian a 39 ans et travaille comme agent de sécurité dans une mine de manganèse. Il est ensuite emmené au Mali, où sa trace finit par se perdre. « Le seul autre otage que j’ai vu est le Roumain Iulian Ghergut, précise Jeffery Woodke. C’était au début de ma captivité, mais je n’avais pas le droit de lui parler. Je n’ai pas d’autres informations sur lui. » L’ancien humanitaire souhaite désormais faire tout son possible pour aider à la libération des autres otages, dont sept Occidentaux.

« J’ai menacé d’y aller par la force »

Au bout de tant d’années, Elvira Ghergut, toujours en quête de preuves de vie de son frère, avait perdu toute confiance envers les autorités roumaines, restées sourdes à ses appels. Depuis huit ans, elle ne dispose que du numéro de téléphone de l’employée du ministère des affaires étrangères qui méthodiquement contacte chaque mois Mihaela Ghergut, l’épouse de Iulian, pour la rassurer et lui dire que son mari est en vie, sans plus de précisions.

Pleine d’un nouvel espoir, Elvira se fait plus offensive. « J’ai réclamé que nous, la famille, soyons reçus au ministère, j’ai menacé, s’ils continuent à ne rien faire, d’y aller par la force, de m’attacher au portail du ministère, je suis prête à tout », défend-elle depuis l’Italie, où elle vit depuis vingt-sept ans. Le récit dans La Croix L’Hebdoa, selon elle, porté ses fruits. « On y lisait qu’ils ne se comportaient pas de la meilleure façon avec la famille. Après la libération des otages, il fallait qu’ils agissent », précise-t-elle.

La famille est enfin reçue, début avril. Elvira Ghergut fait le voyage depuis Rome. Tous prennent alors connaissance de la dernière vidéo de Iulian, qui date de décembre 2021, alors qu’ils étaient restés sans nouvelles depuis 2018.

« Je ne l’ai pas reconnu, il a l’air si faible et triste »

« Je ne l’ai pas reconnu, il a l’air si faible et triste. Je ne comprends pas qu’ils aient mis autant de temps à nous montrer ces images, rapporte Elvira, dépitée mais soulagée. Le cas de mon frère n’est pas oublié, mais j’ai aussi compris que les négociations sont difficiles, que la Roumanie n’a pas de force diplomatique dans la région du Sahel. »

Peu de temps après cette rencontre, Elvira reçoit un appel de Jeffery Woodke. L’ancien otage américain l’a activement recherchée et a trouvé sa trace grâce à un journaliste de Radio Vatican qui l’avait interviewée en 2021. Jeffery Woodke leur dit, à elle et à sa mère Cecilia, sa détermination à les aider, mais aussi la nécessité que le gouvernement roumain s’implique plus activement pour retrouver Iulian. « Ces dernières semaines nous ont redonné de l’espérance », confie Elvira, qui attend désormais que les autorités roumaines suivent cet élan.



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