Des routes migratoires mouvantes à travers la Méditerranée


L’ONG allemande Sea-watch a photographié cette embarcation en détresse en Méditerranée, à 180 kilomètres des côtes libyennes, le 11 mars 2023. Trente migrants sont morts et 17 ont été secourus.

Avec plus de 27 000 migrants débarqués sur ses côtes en 2023, l’Italie est la première porte d’arrivée en Europe pour les personnes qui entreprennent la traversée de la Méditerranée, devant l’Espagne (plus de 4 000) et la Grèce (moins de 3 000). C’était déjà le cas en 2022 et en 2021, tandis qu’en 2020 l’Espagne avait pris la première place, après la Grèce en 2019, à nouveau l’Espagne en 2018 et, déjà, l’Italie en 2017. Les routes à travers la Méditerranée se font et se défont, obéissant à des facteurs géopolitiques, économiques, diplomatiques.

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Cette année, ce sont les départs de Tunisie qui progressent considérablement et qui pourraient faire connaître à l’Italie des volumes de débarquement plus importants qu’en 2016, année record au terme de laquelle plus de 180 000 personnes avaient rejoint les côtes à bord d’embarcations de fortune, au départ de la Libye pour la plupart. Le phénomène est aujourd’hui tiré par les traversées d’Ivoiriens et de Guinéens, qui devancent les Bangladais et les Tunisiens, et fuient de plus en plus souvent en famille. « Les migrants d’Afrique de l’Ouest sont très mobiles, analyse Giovanni D’Ambrosio, du programme Mediterranean Hope, de la Fédération des églises évangéliques d’Italie. Beaucoup d’entre eux sont déjà passés par l’Algérie et le Maroc avant d’arriver en Tunisie, qui est aujourd’hui l’unique endroit au Maghreb d’où partir. »

Plusieurs milliers d’euros

« Même si on atteint les niveaux de 2016, cela reste peu pour un pays de 60 millions d’habitants et pour un continent de 450 millions de personnes, tempère Flavio di Giacomo, porte-parole de l’Organisation internationale des migrations (OIM) pour la Méditerranée. Il faut rappeler qu’en trois mois environ 120 000 Ukrainiens sont arrivés en Italie sans que personne crie à l’invasion. Et n’oublions pas que 80 % des migrants africains restent en Afrique. »

Outre le corridor tunisien (60 % des traversées vers l’Italie), les arrivées de la Libye sont aussi en augmentation. De même, environ 5 % des migrants arrivés en Italie en 2023 ont pris le bateau depuis la Turquie vers la Calabre. Un voyage qui se négocie plusieurs milliers d’euros. « L’existence de cette route est l’une des conséquences des refoulements de migrants depuis la Grèce et du fait que celle des Balkans est de plus en plus difficile, estime Marco Bertotto, de Médecins sans frontière en Italie. La traversée peut s’étaler sur cinq jours et les gens sont en général autour d’une centaine sur des bateaux de plaisance faits pour une dizaine de passagers. » Le naufrage du 26 février sur les plages de Crotone, en Calabre, d’une embarcation partie d’Izmir, en témoigne. Au moins 93 personnes avaient péri en mer, dont une majorité d’Afghans.

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