Électricité, l’Europe engage sa réforme du marché



Elle était très attendue, elle est enfin sur la table. La réforme du marché de l’électricité a été dévoilée par la Commission européenne mardi 14 mars. À Strasbourg, la commissaire européenne responsable de l’énergie, l’Estonienne Kadri Simson, a détaillé le contenu de cette refonte des règles. Celle-ci avait été promise par Bruxelles peu de temps après le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui est allée de pair avec une baisse des livraisons de gaz russe vers l’Europe – tirant donc vers le haut les prix de l’énergie.

L’objectif de l’exécutif européen est triple : stimuler la production des énergies renouvelables, mieux protéger les consommateurs et renforcer la compétitivité industrielle.

Division entre les États membres

Derrière ses aspects très techniques, la refonte du marché de l’électricité est l’un des dossiers centraux de ce début d’année pour l’exécutif européen. C’est aussi une source de division entre les États membres, qui ne sont pas unanimes sur les solutions à apporter.

La France, mais aussi l’Espagne et le Portugal plaidaient pour une refonte radicale du système actuel, dans lequel les prix de l’électricité sur le marché de gros dépendent du coût de la dernière centrale appelée, qui fonctionne la plupart du temps au gaz, d’où les prix très élevés, en cas de forte demande. À l’inverse, sept pays, dont l’Allemagne, avaient adressé un courrier, mi-février, à la Commission lui demandant de se contenter d’une réforme a minima, afin d’adapter le marché aux « nouvelles réalités des énergies renouvelables dominantes ».

L’initiative avait été assez mal perçue à Paris, où l’on militait par des changements radicaux, avec en premier lieu la décorrélation des prix de l’électricité de ceux du gaz.

Paris réussit à imposer son nucléaire

Finalement, la Commission propose un compromis. Elle maintient le système actuel de tarification (dit au coût marginal), mais donne beaucoup de facilités aux États pour le contourner, en autorisant la multiplication des contrats à long terme. C’est un revirement par rapport à la politique menée ces dernières années, où les instances européennes cherchaient avant tout à développer la concurrence entre les opérateurs.

Destinés à réduire la volatilité des prix, ces « signaux de long terme » seront ouverts à toutes les unités de production « bas carbone », c’est-à-dire les énergies renouvelables, mais aussi le nucléaire, y compris les centrales existantes si des investissements substantiels y ont été réalisés, comme c’est le cas pour les réacteurs d’EDF, dont la durée de vie est en train d’être prolongée. C’est un point important pour la France. « Cette proposition de la Commission constitue une bonne base de discussion », souligne-t-on au cabinet de Bruno Le Maire, le ministre de l’économie.

Maintenant que le « paquet législatif » de la Commission a été présenté, les eurodéputés et les États membres vont s’en emparer pour le négocier – certainement durant des mois. « Nous allons travailler à faire aboutir cette réforme le plus tôt possible », assure Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la transition énergétique. Il n’est pas sûr toutefois que les autres États membres souhaitent aller aussi vite.



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