En Inde, fin de cavale pour l’ennemi public numéro un


LETTRE DE NEW DELHI

Amritpal Singh, leader séparatiste sikh, et chef du groupe Waris Punjab De, pose en turban jaune avec ses partisans, dans le village de Jallupur Khera, près d’Amritsar, en Inde, le 7 janvier 2023.

La chasse à l’homme a duré plus d’un mois. Amritpal Singh était devenu l’ennemi public numéro un après avoir attaqué, le 23 février, avec des partisans armés d’épées et de fusils, un poste de police à Amritsar, dans le Pendjab, pour réclamer la libération d’un proche, soupçonné d’enlèvement et placé en garde à vue. Le 18 mars, il avait réussi à échapper à une tentative d’arrestation par la police.

Après trente-six jours de cavale, il a finalement été arrêté dans un village du Pendjab le 23 avril. Il est en prison à Dibrugarh, dans l’Etat de l’Assam. A 30 ans, ce jeune prédicateur radical sikh a fait craindre le renouveau d’un mouvement séparatiste réclamant un Etat indépendant pour la communauté sikh, le Khalistan. Mais sa soudaine ascension laisse perplexes nombre d’analystes, tout comme les difficultés des autorités à l’interpeller.

Amritpal Singh semble avoir surgi de nulle part. Il a commencé à investir les réseaux sociaux après s’être installé à Dubaï, aux Emirats arabes unis, en 2012, où il était parti rejoindre l’entreprise familiale de transport. A son retour en Inde, en août 2022, arborant un nouveau look, longue barbe, turban bleu marine, tunique blanche et kirpan, le poignard de cérémonie des sikhs, il s’est autoproclamé chef d’une organisation séparatiste, Waris Punjab De (« Les héritiers du Pendjab »), créée par Deep Sidhu, un acteur et militant décédé dans un accident de voiture en février 2022, dont il était un partisan. Waris Punjab De avait activement soutenu les grandes protestations des paysans aux portes de Delhi contre les réformes voulues par le gouvernement de Narendra Modi en 2020.

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Si le jeune insurgé a trouvé des soutiens au Canada, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni auprès de la diaspora, il renvoie surtout en Inde aux pages noires de la jeune République.

Cycle de violences inouïes

Le mouvement insurgé sikh prend ses racines dans la décolonisation et la partition de 1947, lorsque les Britanniques décident d’offrir aux musulmans un Etat, en créant le Pakistan. Les sikhs tentèrent sans succès d’obtenir l’équivalent. Leur poids démographique joue contre eux. Ils sont influents mais minoritaires, représentant à peine 2 % de la population de l’Inde. Et leur terre, le Pendjab, est coupée en deux. Chassés par les musulmans, 2,5 millions de sikhs qui vivaient côté pakistanais furent contraints à l’exil vers l’Inde. L’exode provoqua plus d’un million de victimes civiles au Pendjab, épicentre des violences communautaires entre musulmans, hindous et sikhs, entre 1947 et 1948.

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