En Ukraine, le recrutement militaire à la peine


Il serait presque possible d’oublier la guerre dans les rues de Kiev. Plus d’un an après le déclenchement de l’invasion, la capitale ukrainienne et les villes de l’arrière ont retrouvé un semblant de normalité. Aujourd’hui, l’un des marqueurs des combats qui font rage dans le pays se présente sur les murs et aux entrées des villes sous la forme d’une campagne de recrutement pour rejoindre les forces armées. Ces affiches, qui exposent des portraits de soldats aux visages durs et déterminés, appellent les citoyens à s’engager pour défendre le pays. L’une de ces opérations de mobilisation, gérée par le ministère de l’intérieur ukrainien depuis début février, vise à créer huit nouvelles brigades.

Ce projet, dont le processus de recrutement arrive à terme, a pour objectif le « renforcement des forces ukrainiennes », explique la vice-ministre de l’intérieur, Kateryna Pavlichenko. Dans son bureau, l’un des murs est orné d’un portrait de la poète ukrainienne Lessia Oukraïnka (1871-1913) avec une mention rose flashy, « Women’s power ». Composées de différents profils de volontaires passés par un « processus de sélection très exigeant », les brigades visent aussi à répondre à la demande de la « période actuelle », assure la vice-ministre d’un air martial, mercredi 29 mars. « La période actuelle a changé, assène-t-elle. Avant, il s’agissait de défendre le pays. Aujourd’hui, nous devons récupérer nos territoires. »

Mais si la vice-ministre assure que les huit brigades recensent déjà des dizaines de milliers de soldats alors « qu’on [leur] disait que tous les volontaires ont déjà rejoint l’armée et qu’[ils] n’atteindr[aient] jamais la quantité » nécessaire, la perception de la mobilisation générale semble être plus nuancée pour une partie de la population ukrainienne. Après plus de treize mois de guerre, le temps où les bureaux de recrutement de l’armée croulaient sous les demandes de civils prêts à prendre les armes semble être révolu.

Une partie de réfractaires

Le 9 février, alors que le Parlement ukrainien votait pour prolonger de quatre-vingt-dix jours la loi martiale instaurée depuis le 24 février 2022, le président, Volodymyr Zelensky, alors en visite à Bruxelles, reconnaissait des difficultés au sein de l’armée, tout en ajoutant que l’Ukraine ne peut pas, comme la Russie, « conduire les gens à la guerre avec des matraques ». Plus tôt, en janvier, le chef de l’Etat avait signé une loi controversée qui imposait des sanctions plus sévères à l’égard des déserteurs.

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Pour contenir avec succès l’offensive russe lancée cet hiver dans l’est du pays, la mobilisation de soldats semble s’être accélérée depuis deux mois, avec l’apparition sur les réseaux sociaux de vidéos d’enrôlements musclés dans les villes. Le 5 février, dans un entretien publié sur le site du média Oukraïnska Pravda, le ministre de la défense, Oleksii Reznikov, expliquait que la mobilisation dans le pays était nécessaire : « Nos hommes et nos femmes meurent et qu’il y a aussi des blessés. » La question des pertes au sein des forces armées est un secret bien gardé. Selon les estimations d’experts occidentaux, environ 100 000 soldats ukrainiens auraient été tués, blessés ou capturés depuis le début de l’invasion – contre 200 000 militaires russes, selon le ministère de la défense britannique.

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