Geoffroy Lejeune pressenti pour prendre la tête du journal, les salariés vent debout



► Que se passe-t-il au « Journal du dimanche » ?

Geoffroy Lejeune ne mentait pas quand il annonçait aux « amis de Valeurs Actuelles » sur Twitter qu’il les retrouverait « bientôt ailleurs ». Officiellement évincé le 19 juin de l’hebdomadaire – dont il était depuis sept ans le directeur de la rédaction –, il est fortement pressenti pour prendre la direction générale du Journal du dimanche, indiquait Le Monde le 22 juin. Une information que, d’après la Société des journalistes du JDD, la direction de celui-ci n’a pas démentie.

Proche d’Éric Zemmour, Geoffroy Lejeune remplacerait à ce poste Jérôme Béglé, qui prendrait la tête de l’autre titre fraîchement acquis par Vincent Bolloré, Paris Match. Le même jour, les salariés de l’hebdomadaire dominical votaient quasi unanimement une grève de vingt-quatre heures reconductible (77 pour, 1 contre, 5 ne se prononçant pas). Un séisme interne à la rédaction du JDD qui fait trembler depuis l’ensemble du monde médiatique.

► Que craignent les salariés et les membres de la rédaction ?

« Geoffroy Lejeune, ancien directeur de la rédaction de l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs Actuelles, exprime des idées à l’opposé des valeurs que porte le JDD depuis soixante-quinze ans », a estimé la Société des journalistes du Journal du Dimanche dans un communiqué, jeudi 22 juin. La SDJ dénonce également l’arrivée pressentie de la chroniqueuse Charlotte d’Ornellas, dans le sillon de l’ex-directeur de rédaction de Valeurs Actuelles.

Au sein de la rédaction, on s’inquiète d’une extrême droitisation de la ligne éditoriale d’un titre historiquement légitimiste. « Le JDD a toujours suivi le sens du vent gouvernemental. Il est macroniste aujourd’hui comme il a été hollandiste, sarkozyste ou chiraquien », rappelle Patrick Eveno, historien des médias et président de l’Observatoire de la déontologie de l’information.

« Le projet politique de Vincent Bolloré, qui vient de mettre la main sur le JDD, est limpide, ajoute l’historien. Le cas iTélé (devenu CNews, NDLR) en 2016 nous l’a montré, il n’est dérangé ni par le mécontentement ni par le départ des salariés. » Pour lui, seule une perte d’audience du Journal du dimanche pourra éventuellement peser dans la balance.

► Dans quel contexte intervient la probable nomination de Geoffroy Lejeune ?

Le Journal du dimanche, comme Paris Match et Europe 1, a rejoint très récemment l’empire médiatique de Vincent Bolloré. Le propriétaire du groupe Vivendi, qui réunit Canal+, C8 ou encore CNews, a obtenu vendredi 9 juin l’autorisation de la Commission européenne pour s’en emparer à l’issue d’un long et douloureux feuilleton.

Cette prise de contrôle intervient dans le cadre d’une offre publique d’achat (OPA) lancée par Vivendi sur Lagardère. Un rachat synonyme, avant même la nomination pressentie de Geoffroy Lejeune, d’une nouvelle ère pour les deux hebdomadaires.

Si le riche homme d’affaires breton devait attendre l’aval de la Commission européenne pour intervenir dans les affaires des rédactions nouvellement acquises, il est suspecté de n’avoir pas eu cette patience. « Depuis plusieurs mois déjà, son ombre plane sur Paris Match », souligne Patrick Eveno, rappelant que l’hebdomadaire a vu son organigramme chamboulé et ses Unes – notamment celle consacrée au très controversé cardinal Robert Sarah – changer de ton.

Le 15 juin, la Commission européenne a annoncé à l’AFP avoir ouvert une enquête pour « prise de contrôle anticipée » (ou « gunjumping ») de Lagardère. Une enquête qui, si elle aboutit, pourrait valoir au groupe Vivendi une amende allant jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires mondial.





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