Héritage mortel en Aveyron? Un homme jugé pour l’assassinat de sa sœur et de son beau-frère



Le procès de Joël Ayral s’ouvre ce lundi devant la cour d’assises de Rodez. Le double homicide s’est déroulé sur fond de déchirure familiale autour d’un héritage. Lui assure avoir agi en état de légitime défense.

En 2019, la mort violente d’un couple de retraités à Castelnau-de-Mandailles avait été un “choc collectif”. Quatre ans plus tard, le différend familial duquel découle le double homicide est décortiqué devant les assises à Rodez avec l’ouverture, ce lundi, du procès de Joël Ayral. L’homme est accusé d’avoir assassiné sa sœur et son beau-frère sur fond de dispute autour d’un héritage.

Depuis son placement en garde à vue, il admet avoir tué le couple, mais ne cesse d’invoquer la légitime défense. Selon lui, il aurait simplement répliqué aux coups portés par sa sœur Henriette, 78 ans, et le mari de celle-ci, Firmin, 82 ans. Une version qui “ne convainc pas du tout”, Me Anne-Sophie Monestier, avocate des cinq filles des victimes, qui se sont constituées parties civiles avec leurs compagnons.

“Je pense qu’il avait tout prémédité”, affirme-t-elle.

“Une grande tristesse”

Cela fait maintenant 20 ans qu’Anne-Sophie Monestier représente la famille d’Henriette et Firmin. Lorsqu’elle apprend la mort de ses clients, en 2019, elle ressent “un mélange de colère, un sentiment d’injustice et une grande tristesse”. “Quand vous êtes l’avocate de personnes pendant 20 ans, un lien se crée forcément”, explique-t-elle ) RMC Crime.

Pour autant, ce passage à l’acte de Joël n’est, selon elle, pas si étonnant. Car si elle est entrée au service du couple formé par Henriette et Firmin à l’origine, c’est qu’un différend familial minait depuis plusieurs décennies les relations entre l’accusé et les victimes.

En 1975, le père d’Henriette et de Joël accepte que Firmin, son beau-fils, construise une maison juste à côté de chez lui. La nouvelle habitation empiète sur le terrain du beau-père, mais celui-ci n’y voit aucun problème: il signe le permis de construire sans rechigner.

Un conflit autour d’une parcelle de terrain

C’est à la mort du patriarche, quelques années plus tard, que le conflit se noue. Olivier, un autre frère d’Henriette, hérite du terrain de son père, qu’il finit par vendre à Joël. “Depuis, Joël dit que la maison de sa sœur et de Firmin empiète sur sa parcelle”, résume l’avocate.

“Cela faisait des années qu’il disait qu’un jour, il y aurait un drame et qu’il les tuerait”, assure-t-il.

Leur conflit les mène d’ailleurs jusque devant la justice, Joël Ayral engageant plusieurs procédures pour tenter de récupérer le terrain qu’il considère être à lui. Mais, permis de construire à l’appui, sa sœur et son beau-frère parviennent à le débouter à chaque fois. “Les tribunaux ont constaté que le père avait donné l’accord pour la construction, ce qui fait que j’ai tout gagné”, commente Anne-Sophie Monestier.

Selon nos informations, après une nouvelle défaite face à la justice, Joël Ayral décide de faire obstacle au terrain en y entreposant des voitures et du bois. Il va même jusqu’à construire un grillage empêchant Henriette et Firmin de rentrer chez eux. Leur avocate saisit alors le tribunal, qui condamne l’homme à retirer ses objets et à payer une certaine somme d’argent.

“J’ai fait saisir ses comptes car il n’a pas payé spontanément. Ça l’a mis en colère”, raconte encore Anne-Sophie Monestier.

Le suspect invoque la légitime défense

Ce dernier fait a-t-il poussé Joël Ayral à planifier le meurtre des deux retraités? C’est en tous cas à partir de là que les versions divergent entre le récit que le suspect livre aux enquêteurs, et le scénario que ces derniers établissent.

Le 22 mars 2019, Joël se rend donc chez Henriette et Firmin. Selon son récit, il venait pour tailler un arbuste. Il affirme avoir été agressé par le couple et s’être défendu à l’aide du fusil avec lequel il était menacé.

Dans la soirée, il prend soin de se changer, dépose ses vêtements souillés dans une rivière, puis se rend à la gendarmerie d’Espalion, non loin. Là, il raconte avoir tué Henriette et Firmin par légitime défense.

Mais en découvrant la scène de crime, les enquêteurs peinent à croire au récit du suspect: les deux retraités baignent dans une mare de sang devant leur maison, et ils ont vraisemblablement été battus à mort à l’aide du canon d’un fusil et d’une cisaille. L’autopsie révèle qu’ils ont reçu des coups violents à la tête.

“Il ne faut rien attendre de lui”

Malgré ces éléments et sa mise en examen pour homicide volontaire, Joël Ayral maintient sa version coûte que coûte. Même lorsqu’il s’agit de faire une demande de mise en liberté avant son procès, il déclare avoir été “privé de liberté” par ses “deux agresseurs”, rapporte La Dépêche.

“L’enjeu est d’entendre ses explications, l’oralité des débats est nécessaire, il faut rentrer dans le fond de ce dossier”, déclare son avocat, Jean-Marc Darrigade, contacté par RMC Crime.

Les parties civiles, elles, n’attendent “rien” de la parole de l’accusé, qui campe sur ses positions depuis le départ. “On veut la reconnaissance de sa culpabilité, mais je crois qu’il ne faut rien attendre de lui”, conclut Anne-Sophie Monestier.

Après avoir passé 3 ans en détention provisoire, Joël Ayral encourt à présent la réclusion criminelle à perpétuité.



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