la FNSEA clôture son congrès dans le calme



Pour un ministre, prononcer un discours devant les troupes de la FNSEA peut s’avérer un exercice périlleux. Stéphane Le Foll peut en témoigner. En 2016, l’ancien ministre de l’agriculture de François Hollande avait subi l’affront de voir le public lui tourner le dos lorsqu’il était monté à la tribune. L’actuel ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, qui venait clôturer le congrès de la FNSEA à Dunkerque, jeudi 28 mars, allait-il, lui aussi, être accueilli sous les huées par les adhérents du syndicat majoritaire après des mois de tensions au sein du monde agricole ?

C’est finalement dans le calme, face à un public attentif, que le ministre a pris la parole, prononçant un discours axé sur les mesures et leur application plutôt que sur la vision d’un modèle agricole pour la France. Quelques minutes plus tôt, le président du syndicat, Arnaud Rousseau, n’avait pas hésité à tacler l’exécutif. « Qu’il a été long le temps de réaction du gouvernement face aux alertes des agriculteurs français. Une année à vous répéter l’importance de la compétitivité, l’enjeu crucial du renouvellement des générations et la nécessité de consolider le lien avec la société. En vain », a-t-il déclaré.

« Ni défiance, ni complaisance »

Le céréalier, qui s’est rendu à Matignon à plusieurs reprises ces dernières semaines, a tenu à rappeler la position du syndicat vis-à-vis de l’exécutif. « Notre ligne est claire : ni défiance, ni complaisance, ni marcher sur la tête (en référence à l’opération « On marche sur la tête », NDLR), ni d’ailleurs se laisser marcher sur les pieds », a-t-il lancé comme en réponse à la Coordination rurale, deuxième syndicat, qui a dénoncé ces dernières semaines la « cogestion » entre la FNSEA et le gouvernement.

Arnaud Rousseau a néanmoins reconnu les « avancées » de ces dernières semaines. Et elles sont nombreuses, car le gouvernement a largement cédé aux revendications du syndicat, reprenant 62 propositions. Une liste à la Prévert et des victoires majeures pour l’organisation qui défend un modèle productiviste. Le gouvernement qui a relayé ses demandes à Bruxelles a fait pression, avec d’autres États membres, sur la Commission européenne afin qu’elle mène une réforme express de la politique agricole commune ; plusieurs mesures environnementales ont ainsi été détricotées. Pour les importations ukrainiennes, le sujet est toujours en discussion à Bruxelles, le dispositif proposé ne limitant pas assez les flux aux yeux de Paris. La France aimerait par ailleurs que les céréales soient concernées par ce mécanisme, en particulier le blé tendre et l’orge, qui en sont pour l’instant exclus.

Accélérer sur les stockages d’eau

Reste que, aux yeux du président de la FNSEA, les modalités de mise en œuvre de plusieurs mesures tardaient à être précisées. Arnaud Rousseau attendait du gouvernement qu’il dise quand et comment chacune d’entre elles allait être déployée. Marc Fesneau a donc tenté d’avancer un calendrier sur plusieurs sujets. Concernant la promesse de limiter le nombre de contrôles administratifs à un par an et par exploitation, le ministre espère aboutir d’ici à l’été. Au sujet du paiement des aides PAC, il entend « accélérer » notamment pour la filière bio. Sur le dossier retraites, Marc Fesneau a confirmé que la réforme sera appliquée à partir de 2026 avec un calcul des pensions sur les 25 meilleures années.

Concernant l’épineux dossier des stockages d’eau qui oppose agriculteurs et ONG environnementales, le ministre a rappelé que le gouvernement entendait accélérer les processus, en réduisant les délais de recours formulés par ceux qui s’opposent aux projets, et en supprimant un niveau de juridiction. Il a aussi promis qu’une centaine de projets sortiraient de terre en 2024. Le ministre est au passage revenu sur le controversé projet de méga-bassine à Sainte Soline (Deux-Sèvres). « J’ai été l’un des premiers, pour ne pas dire l’un des rares, à défendre Sainte Soline (…) Il faut des Sainte-Soline », a-t-il lancé avant de promettre de revoir la gouvernance des agences de l’eau.

Et maintenant ? Le mouvement de protestation est-il bel et bien terminé ? « Si le vent a faibli, le ciel n’est pas dégagé », a déclaré Arnaud Rousseau avant d’ajouter : « Si la colère est légitime, elle ne peut pas être un projet pour notre avenir. »



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