La journaliste du site « Disclose », à l’origine du scandale Sirli sur la coopération militaire franco-égyptienne, placée en garde à vue
Les autorités françaises sont déterminées à identifier la source de l’affaire Sirli, portant sur la face sombre de la coopération antiterroriste entre Paris et Le Caire. La journaliste qui avait révélé ce scandale en 2021, Ariane Lavrilleux, employée du site d’investigation Disclose, a été placée en garde à vue, mardi 19 septembre, en milieu d’après midi, dans les locaux de l’Evêché, le siège de la police marseillaise.
Son domicile dans la cité phocéenne avait préalablement été perquisitionné par des agents de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Ces procédures résultent de l’enquête pour compromission du secret de la défense nationale et révélation d’informations pouvant conduire à identifier un agent protégé, ouverte en juillet 2022.
« L’objectif de ce nouvel épisode d’intimidation inadmissible à l’égard des journalistes de Disclose est clair : identifier nos sources ayant permis de révéler l’opération militaire Sirli, en Egypte », s’est indignée la direction du média d’investigation. L’ONG Reporters sans frontières a également condamné la perquisition et le placement en garde à vue d’Ariane Lavrilleux. « Nous craignons que les démarches de la DGSI ne portent atteinte au secret des sources », a déclaré l’organisation de défense de la liberté de la presse sur le réseau X (anciennement Twitter).
Opération détournée par l’Egypte
Sirli est le nom d’une opération anti-terroriste conduite par l’armée égyptienne avec le soutien de la France, durant la seconde moitié des années 2010. Cette mission est soupçonnée d’avoir causé la mort de nombreux civils dans des frappes aériennes, dans la zone désertique à cheval entre l’Egypte et la Libye. C’est ce qui ressort des centaines de documents confidentiels, émanant du quai d’Orsay et des services secrets français, qui ont été divulgués en novembre 2021 par Disclose et dont l’authenticité n’a jamais été contestée par Paris.
Ces documents établissent que, à partir de 2016, un appareil de surveillance aérien, opéré par des agents de la direction du renseignement militaire, a traqué les infiltrations djihadistes dans la zone frontalière égypto-libyenne. Des vols menés pour le compte de l’armée égyptienne dans le cadre de la coopération sécuritaire nouée entre Paris et Le Caire, au moment où la Libye était en proie à une forte instabilité.
Si l’on en croit les rapports secret-défense publiés par Disclose, l’opération a été peu à peu détournée de sa vocation antiterroriste par les autorités égyptiennes, à des fins de répression interne. Les informations fournies par l’avion français auraient été exploitées par le régime du président égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, pour cibler des réseaux ordinaires de trafiquants d’armes, de drogue ou de migrants.
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