« La politisation des présidents de l’Assemblée questionne leur capacité à demeurer des arbitres impartiaux du travail parlementaire »


Le 7 juin, Yaël Braun-Pivet a annoncé sa volonté de déclarer irrecevables les amendements de rétablissement de l’article premier de la proposition de loi d’abrogation de la réforme des retraites portant l’âge légal de départ à 64 ans, déposée par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT). Faisant ainsi « barrage » au cœur même du texte, la présidente (Renaissance) de l’Assemblée nationale a pris position dans le débat opposant l’exécutif aux députés de l’opposition.

Si la querelle de fond relative à l’interprétation de l’article 40 de la Constitution a été largement traitée, cette capitulation de la présidente de l’Assemblée nationale en faveur du camp présidentiel (après des semaines de pression) pose la question de la politisation de son rôle. Celle-ci est intrinsèquement liée aux origines de son mandat, à son attachement à son groupe politique d’origine et à sa mission d’appui à l’exécutif.

Pour le groupe Renaissance, il apparaît normal que la présidente se soit (enfin) ralliée aux vœux de celui-ci, dès lors que c’est précisément grâce à lui que Yaël Braun-Pivet a été portée au perchoir. En effet, depuis 1958, à l’Assemblée nationale, la discipline de vote a toujours mené à la présidence un membre issu du groupe dominant de la majorité de la Chambre. L’élection du président de l’institution s’apparente davantage au choix d’un camp qu’à celui d’une personne. Plus encore, les candidats à la présidence reçoivent systématiquement l’assentiment de l’exécutif, comme ce fut le cas pour Yaël Braun-Pivet.

Consensus entre la majorité et l’opposition

Une fois élus, les présidents demeurent membres de leur groupe parlementaire (en l’espèce, du groupe Renaissance) et continuent de jouer un rôle politique important, intra- et extra-muros, devenant, par là même, un rouage essentiel de la mécanique majoritaire.

Dès lors, les présidents des Assemblées parlementaires françaises – en particulier de l’Assemblée nationale – semblent conduire de front deux séries d’activités qui ne doivent pas interférer, questionnant, de fait, sur leur capacité à demeurer des arbitres impartiaux du travail parlementaire.

En choisissant de rester des femmes et des hommes politiques ayant dans leur parti une position importante et amenés ainsi à ne pas paraître totalement neutres dans les rivalités de clans, les présidents des Assemblées ne semblent pouvoir prétendre à l’impartialité dans la direction des travaux de leur Chambre et ne disposent, à ce titre, que de faibles prérogatives dans la conduite des débats, en comparaison d’autres présidents de Chambres à l’étranger, en particulier au Royaume-Uni.

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