Le déménagement des collections du Muséum national d’histoire naturelle de Paris, un vrai casse-tête


Un million de visiteurs arpentent chaque année la Grande Galerie de l’évolution, à Paris, admirant ses quelque 7 000 animaux empaillés plus vrais que nature. Mais, sous leurs pieds, un trésor plus précieux encore est enfoui. Amassé depuis près de quatre siècles, récolté sur tous les continents, bénéficiant des moissons de grands explorateurs tels Bougainville ou Dumont d’Urville, enrichi chaque année, ce butin recèle plusieurs millions d’objets… jadis vivants.
Poissons, reptiles, invertébrés marins, mammifères et oiseaux : ce sont, au total, près de 8 millions de spécimens naturalisés ou conservés dans l’alcool qui sont abrités dans les sous-sols du Jardin des plantes. Cette zoothèque fait partie des fameuses collections du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), qui, fortes de 67 millions de pièces (animaux, végétaux, minéraux et fossiles), constituent une des trois plus riches collections naturalistes au monde, après celles de la Smithsonian Institution, à Washington, et du British Museum, à Londres.
Cette mine de ressources est, pour les chercheurs du monde entier, un inestimable matériau d’analyse de la biodiversité. Elle contient quelque 450 000 spécimens de référence, qui ont permis de décrire leur espèce pour la première fois et servent encore, en taxonomie, de « mètre étalon ».
Exploitation du site menacée
Mais ce trésor est devenu l’objet d’un litige. Construite au début des années 1980, la réserve est saturée et ne répond plus aux critères de réglementation d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE), son statut en raison des dangers qu’elle représente. D’où le projet de son déménagement, évoqué dès 2019. La direction défend aujourd’hui la ville de Dijon, un choix contesté par une partie du personnel du Muséum.
Une pétition a été lancée, recueillant plus de 7 300 signatures au 26 mai, pour demander « l’abandon total de ce projet et l’ouverture de discussions impliquant les personnels ». Comment mener un projet de recherche construit en grande partie sur des collections, si elles sont situées à 300 kilomètres, s’interrogent-ils, tout en admettant « l’urgence à trouver plus d’espace, à rénover les locaux et améliorer les conditions de travail, très loin des standards d’hygiène et de sécurité ».
« Nous sommes face à des contraintes, explique Bruno David, président du Muséum. La zoothèque contient des volumes d’alcool qui dépassent de 120 mètres cubes les capacités des bacs de rétention. » Un grand nombre de spécimens, en effet, sont conservés dans de l’éthanol, liquide hautement inflammable. Par ailleurs, un établissement recevant du public, comme la Grande Galerie de l’évolution, n’est pas autorisé à se trouver au-dessus ou à proximité d’une ICPE. « Il y a donc un risque que la Préfecture nous interdise l’exploitation du site », ajoute le naturaliste.
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