Le Dniepr, un fleuve devenu ligne de front entre Russes et Ukrainiens


Le 24 février 2022, la Russie envahit l’Ukraine. Dans le Sud, ses troupes pénètrent à partir de la péninsule de Crimée, que Moscou occupe depuis 2014, et s’élancent en direction du Dniepr. Le fleuve est franchi dès le premier jour de l’offensive. Durant près de neuf mois, l’armée russe campe de part et d’autre de cette artère essentielle pour l’économie du pays.

Acculée sur plusieurs fronts, elle finit par se retirer à l’est du fleuve, le long duquel elle fortifie ses positions. Dans le sud de l’Ukraine, le Dniepr devient une ligne de front où se font face les troupes de Kiev et de Moscou.

L’embouchure du Dniepr, qui se jette dans la mer
Noire, forme un delta de 350 kilomètres carrés. Large de
1,2 kilomètre, elle est difficilement franchissable
pour une armée. Le fleuve se divise ensuite en plusieurs bras entre
lesquels
des bandes de terre forment des îlots parfois assez larges pour
accueillir
des habitations.

Ce delta est dominé, au nord, par la ville de Kherson
qui
compte avant la
guerre 280 000 habitants. Ce n’est pas la ville la plus importante
du
sud de
l’Ukraine, mais elle est la seule capitale administrative que la Russie
parvient à conquérir.

C’est par le pont autoroutier d’Antonivsky, capable de soutenir le
passage de blindés, que les bataillons de l’armée russe positionnés en
Crimée ont pu franchir le Dniepr dans les toutes premières heures de
l’invasion. L’armée occupe la ville de Kherson et les deux rives du
Dniepr, jusqu’à son retrait, le 10 novembre 2022.

Les troupes russe se retranchent derrière le Dniepr. Après leur départ,
le pont autoroutier d’Antonivsky et le pont ferroviaire
d’Antonivka ont
été endommagés et sont devenus inutilisables. Pour franchir le Dniepr,
le passage le plus proche se situe désormais à 70 kilomètres à l’est.

Alors que les troupes de Moscou avaient progressé
jusqu’aux abords de Mykolaïv, leur retrait de l’autre
côté
du Dniepr voit s’éloigner, pour les Ukrainiens, le risque de perdre
cette
ville, dernier verrou avant le port d’Odessa.

L’armée russe campe désormais sur une seule rive
où elle fortifie ses positions le long du fleuve par la
construction de lignes de défense , qui s’apparentent à des tranchées ou à
des fortifications.

Le Dniepr constitue une ligne de front sur laquelle
les bombardements 
visent aussi bien les sites stratégiques que les axes de communication
et
les zones résidentielles.

L’autoroute M14 est un axe stratégique reliant le port d’Odessa à
celui de
Marioupol occupé par l’armée russe depuis mai 2022. Elle est aussi une
voie
de ravitaillement pour les troupes de Moscou depuis la Crimée, et depuis
la
frontière avec la Russie.

Le canal de Crimée, construit à
l’époque soviétique, alimente en eau la Crimée depuis le Dniepr. C’est
grâce
à ce projet d’envergure que la région est devenue viable sur les plans
agricole et industriel. Après l’annexion de la Crimée, en 2014, le
pouvoir ukrainien avait réduit le débit du canal, jusqu’à sa fermeture,
en 2019. Dès la fin février 2022, l’armée russe ouvre les
vannes
pour remettre en eau le canal et réapprovisionner la péninsule.

La centrale hydroélectrique Kakhovka fournit en énergie
le
sud-est de
l’Ukraine.

Le réservoir de Kakhovka est une retenue d’eau, en amont
du
canal de Crimée,
qui régule l’irrigation. Si le barrage de la centrale
hydroélectrique venait
à être détruit, le Dniepr pourrait déborder, inondant la région de
Kherson
et privant la Crimée en électricité.

La centrale nucléaire de Zaporijia est la plus puissante d’Europe.
Elle est
située à plus de 60 kilomètres de la ville du même nom, dans le port
d’Enerhodar, situé sur la rive du Dniepr aujourd’hui tenue par les
Russes.
La centrale borde le Dniepr, dont les eaux assurent le refroidissement
des
six réacteurs nucléaires VVER-1000. En temps de paix, la centrale
produisait
plus d’un cinquième de l’électricité ukrainienne. Elle est occupée par
les
troupes russes depuis le 4 mars 2022.

En remontant le Dniepr en direction de Zaporijia,
six barrages hydroélectriques se succèdent.
La destruction de l’un de ces ouvrages pourrait menacer
d’inondation
les infrastructures situées en aval du fleuve.

Loin du front, les villes de Zaporijia et
Dnipro,
peuplées respectivement de 800 000 et d’un
million
d’habitants avant la guerre, ne sont pas actuellement sous le feu de
l’armée
russe. C’est à ce niveau du fleuve que l’armée ukrainienne peut
envisager,
aujourd’hui, de franchir le Dniepr pour reprendre, au sud, la ville de
Melitopol et ainsi couper l’axe de ravitaillement entre la Crimée et
Marioupol. Pour l’heure, Russes et Ukrainiens se font face autour du
Dniepr,
frontière naturelle entre les deux armées.

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Zones récupérées par les Ukrainines
depuis l’invasion

Sources : Institute for the Study of War ; Acled ; Eurogeographics ; Agence spatiale européenne ; Communauté OpenStreetMap ; AEI Foreign Policy ; Le Monde

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