Le journal métaphysique de Stéphane Barsacq



Solstices

de Stéphane Barsacq

Éditions de Corlevour, 208 p., 17 €

Il est des sujets dont on ne parle plus guère et que la philosophie aujourd’hui évite : l’âme, la mort, les fins dernières, Dieu, les grands vents de la métaphysique… Se situant d’emblée dans un cheminement personnel, évoqué comme une chronique du « temps ordinaire » à la manière du Zibaldone de Leopardi, Stéphane Barsacq révèle sa Vita nuova.

D’une analyse de la musique dans l’œuvre de Baudelaire à un souvenir qui l’a marqué – l’heideggérien François Fédier, son professeur en khâgne, expliquant qu’il faut lire les Évangiles en grec ; d’une méditation sur François d’Assise, et les ramifications de sa poésie vers la théologie et la mystique, à un aphorisme déplorant l’appauvrissement de l’espace romanesque réduit à un récit – « Le roman n’est pas l’autobiographie. C’est le réel qui se rêve lui-même »… L’auteur dessine une constellation de signes lumineux se répondant, se rapprochant pour éclairer nos interrogations et nos certitudes.

Cette lumière, c’est l’Amour, celui du Nouveau Testament, puis l’Amour courtois du XIIe siècle, loin de l’idée que s’en faisait l’Antiquité – un divertissement ou une maladie –, plus loin encore de la pornographie, liée à l’argent et au néant.

Nullement insensible à ce qui menace la planète, Stéphane Barsacq examine cette Apocalypse évoquée dans les Écritures et peut-être déjà en marche. Avec les agressions contre l’atmosphère et l’aggravation des injustices sociales, la disparition de l’humanité est envisageable, mais, rappelle-t-il, la traduction grecque d’apocalypse signifie « révélation ». Et de révélations, le cheminement de Barsacq en est illuminé, dans une sorte d’hymne à la vie grâce à ceux qui appartiennent à la même famille d’esprits : Hölderlin, Gogol, Nietzsche, Van Gogh, Artaud, déclarés fous mais géniaux, «déchirés entre l’enfance infinie et l’impossibilité de la vie adulte » ; mais aussi Chestov relisant Tolstoï, Simone Weil interrogeant Platon et les Évangiles, Rimbaud et le secret de son drame spirituel – la « question christique » ; ou encore Léon Bloy le visionnaire, maître à penser de Hans Scholl, fondateur avec sa sœur Sophie du mouvement de Résistance antinazie La Rose blanche et guillotiné avec elle le 22 février 1944. Dans une lettre de 1941 – retrouvée seulement en 2008 –, Hans écrivait : «Mes réflexions sont le fruit d’un long travail : c’est Léon Bloy, plus que tout autre, qui m’a poussé à dire quelque chose. »



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