le vote de Barnier contre la dépénalisation de l’homosexualité en 1981 révolte la gauche
L’ancien député RPR avait refusé, comme l’extrême majorité de la droite, d’abolir un article du Code pénal qui réprimait tout «acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe mineur». Même lorsque la majorité sexuelle, de 15 ans, était dépassée.
À peine la nomination de Michel Barnier comme premier ministre était annoncée ce jeudi par l’Élysée que la gauche était indignée. Alors que le Nouveau Front populaire (NFP) est arrivé en tête au second tour des législatives, la coalition électorale pensait que Matignon finirait par leur revenir. Outre les critiques habituelles sur le «vol» du vote des Français, plusieurs responsables politiques et associatifs ont mis en lumière un vote controversé du Savoyard en…1981. Une manière de le discréditer d’entrée de jeu.
Traduction d’une promesse électorale de François Mitterrand, une proposition de loi, portée par la députée et féministe Gisèle Halimi et soutenue par le garde des Sceaux Robert Badinter, prévoit à l’époque d’abolir les «actes impudiques ou contre nature avec un mineur du même sexe âgé de plus de quinze ans», même lorsque le seuil de la majorité sexuelle, fixé à 15 ans, est franchi. Comme la plupart des élus du RPR (Jacques Chirac, François Fillon ou Philippe Séguin), Michel Barnier, alors âgé de 30 ans, vote, le 20 décembre 1981, contre l’instauration de la même majorité sexuelle pour tous les citoyens. Quelles que soient leurs orientations. L’abrogation de cette différence, dans une Chambre basse dominée par la gauche, étant adoptée, elle dépénalise de manière totale les relations homosexuelles.
«Positions homophobes»
Cet évènement reste un marqueur fort de la gauche. La preuve, avec ses réactions à la promotion de Michel Barnier qu’elle accuse peu ou prou de discrimination. «Quel étrange message adresser à un pays qui cherche les voies de son rassemblement que de désigner quelqu’un qui a voté contre la décriminalisation de l’homosexualité», a raillé le chef de file de La France Insoumise Jean-Luc Mélenchon lors de sa prise de parole. Une charge à laquelle se sont ralliés les députés LFI Louis Boyard, ou Claire Lejeune qui s’est moquée du côté «rassembleur» accolé au nouveau premier ministre alors qu’il aurait «tenu des positions homophobes».
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Quelques instants après la passation de pouvoir entre Gabriel Attal et Michel Barnier, la sénatrice écologiste Mélanie Vogel n’y a pas été de main morte sur X, vidéo des deux personnalités à l’appui : «Un homme qu’en 1981, il préférait voir en prison.» La situation est quelque peu paradoxale, confie la parlementaire à Public Sénat, «alors qu’on est à un moment dans le pays où l’on vient d’inscrire l’IVG dans la Constitution et que l’on veut reconnaître ce droit comme fondamental.» Même indignation au sein de l’association Inter-LGBT qui a exprimé sa «consternation». «Un signe plus que jamais clair que le gouvernement sera hostile à nos droits et existences», a-t-elle accusé.
Certes, la nomination de Michel Barnier fait plutôt consensus dans le bloc central. Mais certains lieutenants ont quelque peu tiqué, hors micro, en se remémorant un épisode au début du deuxième quinquennat Macron. Tout juste réélu, le chef de l’État hésite, déjà, pour le choix de son futur premier ministre. Après réflexion, il propose le poste à Catherine Vautrin. Problème, l’engagement de l’ancienne ministre de Jacques Chirac contre le mariage pour tous en 2013 est déterrée. L’indignation domine dans une partie du camp présidentiel, qui fait tout pour empêcher cette nomination. Une levée de boucliers qui aura raison d’Emmanuel Macron, se rapatriant sur une autre hypothèse : Élisabeth Borne. Laquelle finira par être remplacée par… Gabriel Attal.