Les bombardements de l’Azerbaïdjan au Haut-Karabakh, un désaveu pour la Russie

Sur le plan diplomatique, la reprise de l’offensive azerbaïdjanaise au Haut-Karabakh, mardi 19 septembre, est un désaveu pour Moscou. C’est sous l’égide de la Russie qu’avait été conclu l’accord de paix de novembre 2020, et c’est un contingent de « maintien de la paix » russe, fort de 1 960 hommes, qui était censé en assurer l’application, tout comme, en théorie, la sécurité, sur le terrain.
Au lieu de cela, Moscou a laissé perdurer les tensions et n’a pas pu, ou pas voulu, empêcher la partie azerbaïdjanaise d’organiser le blocus du Haut-Karabakh depuis près d’un an. Que ce soit par manque de volonté politique ou de moyens militaires – résultat de l’affaiblissement de son armée dans la guerre qu’elle mène en Ukraine –, la Russie a délaissé son rôle d’arbitre et de garant. Et démontre, une fois de plus, son incapacité à assurer la stabilité dans ce qu’elle revendique comme son arrière-cour, que ce soit dans le Caucase ou en Asie centrale.
Malgré son lien avec l’armée russe, la chaîne Telegram Rybar, qui assure un suivi assidu du conflit régional, allait jusqu’à évoquer, mardi, un « discrédit » porté à la mission russe et au rôle de Moscou comme garant de la sécurité.
Service minimum diplomatique
Les premières réactions de la diplomatie russe à cette nouvelle montée des tensions dans le Haut-Karabakh confirment la position de simple observateur à laquelle se cantonne Moscou. Le ministère des affaires étrangères a ainsi « appelé les deux parties prenantes au conflit » à arrêter le conflit, une déclaration aux airs de service minimum diplomatique et niant l’évidence, à savoir que l’Azerbaïdjan a délibérément pris l’initiative.
Du côté du Kremlin, le porte-parole Dmitri Peskov assurait que « la priorité est la sécurité des forces de maintien de la paix russes ». Il a été obligé de démentir les rumeurs selon lesquelles Bakou avait informé la partie russe en amont de son opération.
Car le soupçon plane depuis longtemps sur la position russe dans le dossier : en 2020, Erevan s’était déjà senti abandonné par son allié traditionnel russe, qui avait laissé Bakou démontrer sa supériorité militaire avant d’obtenir un gel du conflit – et un accord de paix qui, pour ne rien régler sur le fond, rendait quasiment inévitable une reprise des hostilités. A cela s’ajoutent les relations complexes avec la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, soutien appuyé de l’Azerbaïdjan, que la Russie ménage pour des sujets plus prioritaires à ses yeux.
Ces dernières semaines, le gouvernement arménien n’a donc cessé de se distancier de Moscou, multipliant les signaux symboliques – expulsion de journalistes russes, visite à Kiev de la femme du premier ministre, Nikol Pachinian, aide humanitaire à l’Ukraine –, et d’autres plus lourds de sens. Parmi eux, l’organisation d’un exercice militaire conjoint avec les Etats-Unis ou l’annonce d’une ratification par Erevan du statut de Rome, traité fondateur de la Cour pénale internationale, qui a émis, en mars, un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine pour « crimes de guerre » liés à la déportation d’enfants ukrainiens.
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