les écoles argentines à l’épreuve d’une chaleur sans précédent


LETTRE DE BUENOS AIRES

Dans le quartier de La Boca à Buenos Aires, le 14 mars 2023.

« Les élèves de primaire qui le souhaitent pourront assister aux cours avec un maillot de bain, des tongs et un vêtement de rechange ; la récréation se tiendra à l’ombre, avec un tuyau d’arrosage ». Samedi 11 mars, les parents d’élèves ont reçu cette note inattendue de la part de la direction de l’école primaire publique Francisco de Gurruchaga, à Rosario (300 km au nord-ouest de Buenos Aires).

Le pays suffoque. Et depuis des semaines. L’Argentine enregistre son été le plus chaud de l’histoire et enchaîne les épisodes de canicule, avec des températures ressenties dépassant à plusieurs reprises les 40 °C, notamment dans la capitale. Ces vagues de chaleur ont commencé tôt, à la fin du printemps, et se poursuivent sans répit, même au mois de mars, qui signe normalement l’arrivée de l’automne austral.

« Mars extrême », constate le service météorologique national qui rapporte des records historiques. Dans le nord de la province de Buenos Aires, par exemple, les températures ont dépassé de 10 °C les normales de saison, les dix premiers jours du mois. Pour la première fois, la ville de Buenos Aires a dépassé son record de journées sous des températures élevées (le seuil de 32,3 °C est retenu) : douze jours d’affilée, le 11 mars. Une situation liée au phénomène climatique naturel « La Niña », mais aussi au dérèglement climatique.

Salles surchauffées

Leur blouse blanche enfilée au-dessus de leurs vêtements (l’uniforme de l’école publique), les élèves retrouvent ainsi leurs salles de cours – entre fin février et début mars selon les régions – sonnés par la chaleur. « Certains d’entre eux faisaient des malaises », rapporte Mariana Sanchez, la directrice de l’école primaire Francisco de Gurruchaga, où les élèves ont rouvert leurs cahiers en maillot de bain. Les salles sont surchauffées. Pourtant, dans cette école, des équipements de climatisation existent, mais ceux-ci ne fonctionnent pas. « Il nous paraissait très important pour la continuité de l’apprentissage, que les élèves viennent à l’école, malgré la chaleur. Nous avons donc proposé, et non imposé, l’usage du maillot de bain. On peut très bien continuer à apprendre en maillot, pas besoin d’être en uniforme », explique la directrice.

« Les écoles ne sont pas assez équipées ! Il y a peu de ventilateurs, beaucoup sont cassés. On a parfois 30 à 35 élèves par salle. » Federico Puy, porte-parole d’un syndicat enseignant

Tous les établissements scolaires ont été mis à l’épreuve de la chaleur extrême, révélant les difficultés d’apprentissage et d’enseignement lors d’une canicule prolongée mais aussi les carences en matière d’infrastructure. Une problématique d’autant plus saillante que les épisodes climatiques extrêmes sont amenés à se répéter en raison du dérèglement climatique. « Dans la salle où j’enseigne, je n’ai ni climatisation, ni ventilateur. J’étais bien obligée d’ouvrir les portes-fenêtres mais ce n’est vraiment pas souhaitable niveau sécurité avec des enfants, parce qu’elles donnent sur un balcon », décrit Ana (son prénom a été modifié), professeure de théâtre dans une école publique de Buenos Aires. Les élèves, environ 27 par cours, « ont beaucoup souffert, ils étaient épuisés, surtout le premier niveau de la primaire. Moi aussi, j’étais totalement assommée », poursuit l’enseignante qui a adapté ses cours à la chaleur, avec des exercices plus lents, ou de relaxation au sol.

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