Les ex-frères ennemis du Crédit Mutuel affichent leur réconciliation à Strasbourg



Trois semaines après un accord mettant fin à 15 ans de conflit, Julien Carmona, président du Crédit Mutuel Arkéa, et Nicolas Théry, président du Crédit Mutuel et de la fédération de l’Est, se sont pour la première fois montrés côte à côte vendredi.

Une fois l’encre séchée vient le temps d’afficher publiquement la réconciliation. “C’est une paix, une réconciliation, qui ne souffre d’aucune ambiguïté”, a salué sous les applaudissements Nicolas Théry sur la scène du Zénith de Strasbourg, devant environ 5.500 sociétaires du Crédit Mutuel Centre Est Europe, la plus importante fédération du Crédit Mutuel.

À ses côtés, Julien Carmona, plus réservé, s’est dit “très heureux” d’être à Strasbourg pour “cette réconciliation qui fait chaud au coeur”. Les deux entités, qui se sont fait la guerre pendant des années, ont “beaucoup de valeurs communes, beaucoup de valeurs partagées”, a-t-il ajouté. Isabelle Ferrand, nouvelle directrice générale de la Confédération nationale du Crédit Mutuel (CNCM), l’organe central qui chapeaute l’ensemble des fédérations du groupe, a salué “une nouvelle ère qui s’ouvre”.

Cette rencontre entre les deux dirigeants, “inimaginable” il y a quelques années, selon un proche de Nicolas Théry, survient trois semaines après la signature d’un accord historique. “On a mal vécu ces dernières années”, a déclaré Daniel Baal, directeur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale, principale entité du groupe, qui réunit 14 des 18 fédérations régionales et le CIC. Il s’est ensuite réjoui d’avoir pu échanger avec Hélène Bernicot, directrice générale de Crédit Mutuel Arkéa, pour “proposer bientôt un projet”, espérant que cela “pourra continuer”.

Une guerre fratricide depuis près de 10 ans

Des tensions internes s’étaient mues en conflit juridique en 2014, opposant Crédit Mutuel Arkéa dont le siège est au Relecq-Kerhuon, près de Brest, et la CNCM. Le premier accusait le CNCM de centralisation et de favoritisme en faveur de l’autre entité dominante, le Crédit Mutuel Alliance Fédérale (anciennement Crédit Mutuel CM-11), qui réunit aujourd’hui 14 fédérations. Nicolas Théry, président du groupe Crédit Mutuel est également le président de Crédit Mutuel Alliance Fédérale.

En 2018, les relations s’étaient envenimées au point que la branche bretonne souhaitait s’émanciper du groupe, un projet mené par l’ex-président d’Arkéa, Jean-Pierre Denis, mais qui n’a jamais abouti. Élu président de Crédit Mutuel Arkéa en 2021 en remplacement de M. Denis, Julien Carmona avait reconnu dans un entretien à l’AFP que “la tutelle du Crédit Mutuel, instituée par la loi, n’avait pas empêché Arkéa de se développer”. Tout en réaffirmant s’inscrire “sans aucune hésitation” dans le projet d’indépendance de sa banque, il dénonçait encore “une tendance à la centralisation”. Mais les mois passant, et alors que le projet d’indépendance semblait au point mort, les discussions avaient repris à l’été 2022, avant d’aboutir début mai.

Un accord enterrant la hache de guerre

L’accord prévoit que “les groupes régionaux déterminent librement leur stratégie et plus largement leur projet d’entreprise, dans le respect des règles prudentielles”, et l’existence pour les fédérations d’un “droit de véto (…) en cas d’atteinte à leurs intérêts vitaux”. Un poste de vice-président du CNMC, “qui reviendra de droit au président de la fédération du Crédit Mutuel de Bretagne”, est également créé, permettant à Arkéa de retrouver ce poste qu’il occupait jusqu’à sa suppression en janvier 2011.

Un an après une assemblée générale qui s’était conclue avec Nolwenn Leroy, clin d’oeil à la Bretagne où se situe le siège d’Arkéa, c’est cette fois-ci le pianiste Alain Lanty qui a ouvert le concert, interprétant plusieurs chansons françaises, où il était notamment question d’éloignement et d’amour.



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