l’opération Wuambushu se poursuit, liaison maritime vers les Comores incertaine



Trois jours après son lancement, l’opération “Wuambushu” se poursuivait jeudi à Mayotte. Mais le volet migratoire est quasiment à l’arrêt, et la reprise des expulsions depuis le 101e département français vers l’archipel voisin des Comores demeure incertaine.

L’opération sécuritaire “Wuambushu” s’est poursuivie, jeudi 27 avril, à Mayotte, mais la confusion régnait sur la reprise des expulsions depuis l’île française vers les Comores. La compagnie maritime refuse d’assurer les traversées “jusqu’à nouvel ordre” malgré la réouverture des ports de l’archipel.

Dès l’aube, le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, a annoncé la poursuite des opérations de lutte contre la délinquance, les bidonvilles et l’immigration illégale dans ce département de l’océan Indien, le plus pauvre de France.

“On poursuit à Mayotte les opérations de sécurisation, en particulier dans les quartiers dans lesquels on a les bandes de délinquants”, a déclaré le préfet à la presse, après une nuit émaillée de “violences urbaines” à Doujani, sur la commune de Mamoudzou. Les forces de l’ordre ont interpellé deux personnes et neuf policiers ont été blessés, selon le ministère de l’Intérieur.

“Un coup d’accélérateur décisif”

Le préfet s’exprimait à Longoni, sur la commune de Koungou (au nord-est), où quelques habitats informels ont été rasés dans la matinée par des tractopelles pour faire place au chantier d’un lycée professionnel.

Ce petit bidonville, objet d’un arrêté de démolition depuis décembre, a abrité une dizaine de familles mais était “vide” d’habitants permanents, selon Thierry Suquet. Des solutions d’hébergement ont été proposées ces derniers mois à celles qui y font des allers-retours, a-t-il assuré.

“Il y a pas de solution, rien du tout”, a affirmé sur place Zarianti Bina, 32 ans. “Ça fait un an qu’on est en procédure, on n’a eu aucune notification” alors que “ma mère habite sur ce terrain”, a-t-elle ajouté.

Dans le cadre de l’opération baptisée “Wuambushu” (“reprise” en mahorais), le gouvernement prévoit de détruire des bidonvilles après en avoir délogé des étrangers en situation irrégulière. Les sans-papiers comoriens doivent être expulsés par bateau vers Anjouan, l’île comorienne la plus proche, à 70 km de Mayotte.

Interrogé sur les maigres résultats de l’initiative, marquée par le déploiement de 1 800 policiers et gendarmes depuis une dizaine de jours, le préfet a défendu “un coup d’accélérateur décisif” à des actions “de longue durée”, qui “ont commencé avant et vont se poursuivre après” le départ des renforts.

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Surveillance par les militants des droits humains

L’opération est surveillée de près par les militants des droits humains. La Défenseure des droits, Claire Hédon, s’est dite, mercredi, “particulièrement attentive au respect inconditionnel” des droits fondamentaux à Mayotte, annonçant l’envoi de juristes.

Des associations ont lancé plusieurs recours devant la justice contre les opérations de “décasage”, c’est-à-dire de destruction de cases en tôle. Le tribunal de Mamoudzou a suspendu, en début de semaine, l’évacuation d’un important bidonville à Koungou, Talus 2.

Le député LR de Mayotte, Mansour Kamardine, a dénoncé un “harcèlement judiciaire orchestré par des associations ‘droitdelhommistes’, main dans la main avec des magistrats partisans”.

Les élus du 101e département français expriment un large soutien à “Wuambushu”, au diapason d’une grande partie de la population.

Les appels à la mobilisation se multiplient au sein de collectifs citoyens qui espèrent un coup d’arrêt à l’insécurité minant le territoire.

Une reprise des traversées incertaine

Plusieurs centaines de Mahorais, dont une majorité de femmes, se sont ainsi rassemblés, jeudi, au stade de Chirongi (au sud) pour appeler à intensifier “Wuambushu”, selon des journalistes de l’AFP sur place.

Sous une nuée d’accessoires tricolores et de drapeaux français brandis par les femmes, des banderoles clamaient : “Stop aux titres de séjour” et “merci aux forces de l’ordre, héros du quotidien”.

“Nous sommes pacifistes, nous voulons juste récupérer nos biens”, a déclaré Saïd Kambi Saïd, suppléant de la députée Estelle Youssoufa (Liot). S’adressant à l’Union des Comores, il a ajouté : “Vous n’avez pas pitié de votre peuple. Les droits de l’Homme commencent chez vous”.

Les autorités portuaires comoriennes ont annoncé, jeudi, que les bateaux en provenance de Mayotte étaient à nouveau autorisés à accoster, après une suspension de quelques jours.

Mais “ne débarqueront demain (vendredi) que des passagers (comoriens) qui seront pourvus de leur carte d’identité nationale”, a prévenu Mohamed Salim Dahalani, directeur des autorités portuaires, lors d’une conférence de presse au port anjouanais de Mutsamudu.

La reprise des traversées vendredi restait toutefois plus qu’incertaine. La compagnie maritime SGTM, qui opère la liaison Mayotte-Anjouan avec le navire Maria Galanta, a en effet annoncé sur les réseaux sociaux qu’elles étaient suspendues “jusqu’à nouvel ordre”.

L’opérateur a pris cette décision “compte tenu du contexte actuel, qui entrave le bon fonctionnement de son activité”, a-t-il indiqué sans autre précision. Ni la préfecture de Mayotte ni le ministère de l’Intérieur n’ont commenté cette annonce.

Avec AFP



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