« On ne peut pas dissoudre le mouvement des peuples de l’eau »


Vue aérienne du chantier de la réserve d’eau de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), le 11 avril 2023.

Les 24, 25 et 26 mars 2023, plus de 25 000 personnes se sont rassemblées dans le Marais poitevin, la deuxième plus grande zone humide de France, pour une mobilisation internationale contre les projets de mégabassines. Ces énormes cratères géants, d’une dizaine d’hectares, remplis en puisant dans les nappes phréatiques incarnent le maintien coûte que coûte d’un modèle agro-industriel qui écrase les paysans et détruit les milieux de vie. Déjà mis en place au Chili depuis quelques décennies, leurs effets y sont dévastateurs : les milliardaires propriétaires de cultures d’avocats accaparent l’eau pour remplir des mégabassins, tandis que les villages alentour sont ravitaillés en camion-citerne. « No es sequia, es saqueo ! », résume le slogan populaire qui résonne du Chili au Mexique – « Ce n’est pas une sécheresse, c’est un pillage ! »

Pollution, surexploitation, marchandisation, accaparements, bouleversement des cycles de l’eau : partout dans le monde la situation est critique. Alors que la pénurie d’eau affecte 40 % de la population mondiale, les géants de l’agroalimentaire Danone, Nestlé ou Coca-Cola s’approprient les eaux de source, privant les peuples autochtones du Mexique, des Etats-Unis et du Canada de leur eau, pour la vendre à prix d’or dans des bouteilles en plastique. Ailleurs se multiplient également des mines et de grands barrages qui détruisent les territoires encore peuplés par des communautés paysannes et autochtones, à l’unisson avec les injonctions capitalistes à « décarboner » les économies.

Malgré la « guerre de l’eau » de Cochabamba, en Bolivie en 2000, les contre-sommets, la reconnaissance du droit à l’eau, en 2010, par l’ONU, les privatisations et la financiarisation de l’eau n’ont cessé de progresser. L’eau est même entrée en Bourse en 2020. Face à cette offensive écocidaire sur l’eau, les terres et nos moyens de subsistance, les luttes pour l’eau continuent d’essaimer et de se lier à travers le monde.

Une révolte vitale qui grandit

Certains d’entre nous étaient donc présents physiquement à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) en France ce 25 mars, pour faire résonner et internationaliser nos combats. Nous, militants du Chili en lutte contre le saccage de nos écosystèmes par le néolibéralisme autoritaire ; militants du Mali et d’Afrique de l’Ouest en lutte pour récupérer nos terres contre les accaparements ; militants du Kurdistan opposés à la guerre implacable menée par le régime d’Erdogan en Turquie, qui se sert de l’eau comme d’une arme ; mais aussi militants autochtones yukpa d’Abya Yala, en lutte pour l’autodétermination de nos peuples face à un système colonial et extractiviste ; de la nation Lakota, du Mexique ; des centres sociaux du nord-est de l’Italie ou du No TAV [non au TGV Lyon-Turin] ; militants français et européens impliqués dans des centaines de luttes territoriales contre des projets destructeurs. D’autres étaient présents à travers la chaleur de nos cœurs et de nos pensées.

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