Que sont devenus les précédents impôts “temporaires” en France?


Le ministre de l’Économie assure que la hausse de la fiscalité pour les plus fortunés et les grands groupes sera “temporaire”. Mais de nombreux impôts censés être provisoire ont perduré des années durant.

Dans la langue française temporaire et constant sont des antonymes. Après la déclaration de politique générale de Michel Barnier, le ministre de l’Economie, Antoine Armand, a insisté, ce mercredi 2 octobre sur RTL, sur le fait que la hausse d’impôts à destination des grandes entreprises et des ménages les plus aisés serait “temporaire”.

D’aucuns craignent pourtant que celle-ci se pérennise. Cette crainte est-elle justifiée? Qu’est-ce que les précédents impôts “exceptionnels et temporaires” peuvent nous apprendre?

• Vignettes automobiles

En 1956, le président du Conseil des ministres Guy Mollet instaure la vignette automobile afin de financer un revenu minimum pour les personnes de plus de 65 ans dans l’attente d’une “ressource pérenne”. La voiture est alors considérée comme un produit haut de gamme. Le montant de cette taxe dépend de la “puissance fiscale” du véhicule. Il faudra attendre plus de 40 ans, pour que sa suppression soit annoncée par Laurent Fabius en août 2000, alors ministre de l’Économie du gouvernement de Lionel Jospin.

• La contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS)

La CRDS est un impôt, prélevé sur presque tous les revenus, destiné à résorber l’endettement de la sécurité sociale. Il avait été mis en place en 1996 pour une durée initiale limitée à 13 ans et un mois. Cette taxe, qui a été prolongée à plusieurs reprises, devait disparaître en 2024 si la dette de l’assurance-maladie avait été remboursée. Ce scénario a été abandonné durant la pandémie avec une nouvelle échéance à 2033, voire 2042.

• La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus

Instaurée en 2011 par le gouvernement Fillon pour faire face aux conséquences de la crise financière de 2008, cette taxe met à contribution les hauts revenus à hauteur de 3% et 4% en fonction d’un seuil et s’ajoute à l’impôt sur le revenu. Prévue “jusqu’à l’année au titre de laquelle le déficit public est nul”, soit, initialement, 2017 selon l’engagement de l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, la taxe existe toujours.

Le Duel de l’Eco : Impôts vers une contribution exceptionnelle ? - 01/10
Le Duel de l’Eco : Impôts vers une contribution exceptionnelle ? – 01/10

Pour rappel, le déficit public pourrait s’élever à 6,2% du PIB en 2024 selon les dernières estimations. Michel Barnier entend le ramener à 3% du PIB d’ici à 2029. La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus semble avoir de beaux jours devant elle.

• Hausse de l’impôt sur les sociétés (IS) pour les grandes entreprises

En 2011, le gouvernement Fillon avait également remonté de 5%, le taux de l’impôt sur les sociétés (alors de 33,5%) pour les entreprises de plus de 250 millions d’euros de chiffre d’affaires. Une mesure prolongée par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault en 2012, qu’il amplifie un an plus tard avec un ajout de 11% afin de dégager 2,5 milliards d’euros de contributions supplémentaires.

Si Emmanuel Macron a depuis abaissé l’IS à 25%, le chef de l’Etat s’était également résout à une surtaxe temporaire de celui-ci en 2017. Pour faire face à l’annulation de la taxe sur les dividendes par le Conseil constitutionnel, le président avait consenti à appliquer 5 points supplémentaires d’IS pour les 320 plus grandes entreprises françaises dépassant le milliard d’euros de chiffre d’affaires (et +10 points d’IS au-delà de 3 milliards d’euros). Cette mesure avait rapporté 5,4 milliards d’euros.

• Contribution sur “les rentes inframarginales” des producteurs d’électricité

À l’initiative de Bruxelles, Bercy a mis en place en 2022 une taxe sur les producteurs d’électricité. Ces derniers avaient profité de difficultés d’approvisionnement de gaz, en raison de la guerre en Ukraine, pour enregistrer des profits colossaux. Reconduite en 2023, elle a rapporté près de 6 milliards d’euros à l’Etat, un chiffre jugé décevant comparé aux attentes.

L’ancien ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, prévoyait de reconduire la contribution en 2024. Le projet de taxe a été laissé sur le bureau de Michel Barnier par le gouvernement sortant. Celui-ci pourrait rapporter 3 milliards d’euros à l’État, en raison d’un meilleur ficelage.



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