Renaud Capuçon, le virtuose qui a plusieurs cordes à son art


Renaud Capuçon, à l’hôtel Brach, à Paris, le 12 décembre 2022.

Une valise plate, un peu plus grande qu’un attaché-case. Renaud Capuçon ne s’en sépare que rarement mais personne ne remarque cette grosse mallette noire. Ceux qui croisent sans le reconnaître ce blond élégant, dans les avions ou les trains, s’étonnent bien plus de le voir lire des partitions, ses mains marquant discrètement le rythme qui bat dans son esprit. La valise est là, posée négligemment sur une table, suffisamment insignifiante pour qu’on s’inquiète : « Vous n’avez pas apporté votre instrument ? » Petit sourire. Claquement de serrure. Et soudain, les merveilles apparaissent.

Deux violons, infiniment légers, d’un bois patiné et mat, que Renaud Capuçon saisit avec décontraction. « Le premier est un stradivarius. Le second, un guarneri del gesù sur lequel jouait Isaac Stern [grand violoniste du XXe siècle mort en 2001] », explique le musicien en vous les tendant, alors qu’on ose à peine les toucher.

Renaud Capuçon, 47 ans, en a plusieurs autres, mais ces deux instruments-là sont les plus précieux. Pas seulement parce qu’ils coûtent chacun au-delà de la dizaine de millions d’euros, mais aussi parce que c’est avec eux qu’il offre une personnalité à son jeu, une âme à la musique.

De gauche à droite, le guarneri et le stradivarius prêté par LVMH. Dans le couvercle de la mallette, deux photos de Renaud Capuçon avec le pianiste Nicholas Angelich, une autre avec le violoncelliste Yo-Yo Ma et le chef d’orchestre Daniel Barenboim, et une dernière avec Eliott, le fils qu’il a eu avec Laurence Ferrari, tous deux de dos. A Paris, le 12 décembre 2022.

Lors d’un dîner où était présent le grand chef d’orchestre Daniel Barenboim, un des convives avait demandé à Renaud Capuçon : « Est-ce que le public se rendrait ­vraiment compte de la différence si vous jouiez avec un violon à 20 000 euros ? » Daniel Barenboim avait alors répondu à la place du violoniste : « Oui, parce que c’est ce violon-là qui l’inspire. »

Les deux instruments impressionnent par leur beauté ancienne. « Si je voulais vous donner un élément de comparaison, je dirais que l’un est un immense bourgogne et l’autre un immense bordeaux », souligne Renaud Capuçon, avant de montrer en détail chacun des violons qui l’accompagnent. Le premier a été fabriqué à Crémone, en Lombardie, par Guarneri del Gesù, ce luthier du XVIIIe siècle contemporain et rival d’Antonio Stradivari, qui a fabriqué le second. Deux violons d’exception pour un musicien…

Agenda de ministre, discipline d’athlète

C’est à cela que l’on mesure le talent, la reconnaissance du public mais aussi l’entregent et les relations d’un soliste. De tout cela, Renaud Capuçon ne manque pas. Courant les concerts, en France et à l’étranger – pas moins d’une vingtaine dans les mois à venir –, il a un agenda de ministre, une discipline d’athlète de haut niveau – zéro alcool, microsiestes dans les avions, répétitions quotidiennes – et un carnet d’adresses rempli de noms de grands patrons.

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