Assemblée nationale : François Fillon auditionné sur ses liens avec la Russie


François Fillon est de retour à l’Assemblée nationale. L’ancien Premier ministre (2007-2012) est auditionné à partir de 17h30, ce mardi, sur ses liens avec la Russie et sa présence un temps au sein de deux conseils d’administration de multinationales russes. Ce retour de l’ex-député de la Sarthe intervient près d’un an, à quelques jours près, après sa condamnation en appel dans l’affaire des emplois fictifs de sa femme Pénélope à quatre ans d’emprisonnement dont un an ferme, 375 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité. Le couple a annoncé son intention de se pourvoir en cassation.

L’ex-candidat des Républicains à la présidentielle de 2017 va se présenter devant la commission d’enquête initiée par le Rassemblement national (RN) et consacrée aux « ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères ». Cette commission, qui planche depuis plusieurs semaines et doit achever ses travaux début juin, fait polémique à l’Assemblée : les autres camps reprochent à l’extrême droite une stratégie de « diversion » face aux accusations de proximité entre le RN et le Kremlin, le siège de la présidence russe.

Il a défendu la position de Moscou au début de la guerre contre l’Ukraine

Depuis sa défaite en 2017, François Fillon s’est reconverti dans le privé et a notamment siégé aux conseils d’administration des entreprises russes Sibur (pétrochimie) et Zarubeshneft (hydrocarbure). Le 24 février 2022, au moment même où l’armée russe envahissait l’Ukraine, l’ancien chef de gouvernement s’est attiré de vives critiques après avoir déploré « le refus des Occidentaux » d’entendre les revendications de Moscou, la capitale russe, concernant l’Otan (Organisation du traité de l’Atlantique nord). Le lendemain, il a annoncé démissionner de ses mandats russes.

François Fillon a rejoint en décembre 2021 le conseil d’administration de Sibur, notamment contrôlé par Leonid Mikhelson, l’un des hommes les plus riches de Russie, et Guennadi Timtchenko, un proche du président Vladimir Poutine visé par des sanctions. Quelques mois plus tôt, en juin 2021, il a intégré la même instance chez Zarubezhneft, détenue par l’Etat russe.

L’audition de François Fillon à l’Assemblée a lieu alors que le parquet national financier a par ailleurs ouvert une enquête préliminaire sur des soupçons de corruption d’agent public étranger visant Cifal, une société française de commerce opérant en Russie. Selon une source proche du dossier, Cifal a été missionnée par la société congolaise Orion (dirigée par Lucien Ebata, conseiller spécial du président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso) pour trouver en Russie un investisseur auquel vendre ses parts dans le gisement pétrolier MBK au Congo. Dans cette optique, le dirigeant de Cifal, Gilles Rémy, a fait appel à François Fillon pour qu’il le mette en relation avec un homme d’affaires russe. Dans ce contrat, François Fillon a été rémunéré en qualité d’apporteur d’affaires. Aucun soupçon de corruption ne pèse actuellement sur lui, a précisé cette source proche du dossier.

Une commission lancée par le RN sur fond de rencontre Poutine-Le Pen

Certains soupçonnent le RN d’avoir lancé la commission d’enquête sur les ingérences étrangères a été pour tenter de couper court aux accusations faisant du parti d’extrême droite un agent de l’influence russe en France. Jean-Philippe Tanguy (RN) en est le président ; la députée Renaissance et ex-LR Constance Le Grip en est la rapporteure. Plusieurs responsables politiques ont déjà été auditionnés, notamment François Hollande, Nicolas Sarkozy mais aussi le député européen RN Thierry Mariani, visé quant à lui par deux enquêtes préliminaires sur de possibles faits de corruption et de trafic d’influence avec une association franco-russe. Pour Constance Le Grip, « le point le plus saillant » de cette commission, « ça reste la stratégie d’influence et d’interférence entre la Russie et le FN devenu RN, avec le rendez-vous de Marine Le Pen au Kremlin », le siège de la présidence russe, avant la présidentielle de 2017. « On n’est pas dupe de la stratégie » de diversion du RN dans cette commission, souligne-t-elle.

Jeudi, l’ancien député européen RN Jean-Luc Schaffhauser sera auditionné sur le prêt russe de 9,4 millions d’euros accordé au parti de Marine Le Pen en 2014. Il est visé par une enquête du parquet national financier sur des commissions qu’il aurait perçues pour l’obtention de ce prêt et les conditions dans lesquelles le parti a obtenu, en 2017, auprès d’un homme d’affaires français très implanté en Afrique, Laurent Foucher, un autre prêt de 8 millions d’euros.



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