La Fédération française de taekwondo condamnée à repasser par les urnes


À un peu plus d’un an des Jeux olympiques, alors que le mouvement sportif est en pleine crise, voilà la Fédération française de taekwondo contrainte de refaire ses élections fédérales, plus de deux ans après l’installation à la présidence d’Hassane Sadok.

De nouvelles élections de délégués dans six ligues régionales (ce sont ces délégués qui éliront par la suite le comité qui désignera le président de la Fédération) doivent également être réorganisées. La décision émane d’un jugement du tribunal de Lyon, qui avait été saisi par un collectif, notamment emmené par Mikael Meloul, candidat malheureux à la présidence de la fédération.

« C’est une décision rare, la reconnaissance claire, nette et limpide des actions qui ont été menées, estime Tatiana Vassine, avocate du collectif. C’est un travail de fourmi qu’il a fallu réaliser pendant trois ans. S’attaquer à une fédération, qui ne dispose pas des mêmes moyens administratifs et financiers que les plaignants, n’est pas évident. C’est David contre Goliath. »

« Des manquements graves aux règles électorales »

Dès décembre 2020, le collectif s’était mobilisé. Dans un premier temps, il avait alerté la conciliation du CNOSF, qui était alors allé dans son sens, demandant déjà à la fédération d’organiser de nouvelles élections. L’avis n’étant alors que consultatif, aucun accord n’avait été trouvé entre les parties, le collectif souhaitant notamment que les élections soient organisées sous le regard d’un administrateur indépendant, comme l’a finalement décidé le tribunal.

Car ce sont des « manquements graves aux règles électorales » que dénonçaient les plaignants : non-respect du délai de convocation (les votants ont été convoqués à Lyon seulement trois jours avant l’assemblée générale fédérale), non-respect du nombre de pouvoirs (certains licenciés ont voté sans pouvoir, d’autres ont voté pour des clubs qu’ils ne pouvaient pas représenter…), méthode de calcul irrégulière, absence de réunions électives, chiffres erronés (une différence de 20 000 licenciés a été pointée, alors que c’est le nombre de licences qui détermine le nombre de délégués)…

Les différentes élections s’étaient déroulées pendant l’État d’urgence sanitaire. Si le ministère des Sports avait alors donné la possibilité aux fédérations de repousser leurs élections en 2021, la fédération française de taekwondo, contrairement à beaucoup d’autres, n’avait pas souhaité le faire.

Des assemblées générales organisées en présentiel pendant la crise sanitaire

Les opposants avaient également noté que le décret, qui à l’époque fixait les autorisations de sortie lors de l’état d’urgence sanitaire, n’avait pas été respecté. Certaines assemblées générales s’étaient ainsi tenues en présentiel (ce n’était pourtant pas autorisé et certaines personnes ne pouvaient pas se déplacer au-delà d’un certain rayon de km et sans raison valable), avec donc un nombre de participants peu élevé.

« De nombreux départements se sont retrouvés sans délégué, l’assemblée générale (fédérale) a ainsi été amputée d’une partie de ses représentants », note le collectif, qui estime que « l’assemblée a été dotée de représentants illégalement désignés, les principes statutaires et démocratiques n’ayant pas été respectés (lors de l’élection de ces représentants). »

Dans sa décision du 3 mai 2023, le tribunal a donc annulé les résultats des précédentes élections et désigné un administrateur, qui a 6 mois pour en organiser de nouvelles. « Une décision injuste », selon Hassane Sadok, que nous avons pu joindre ce jeudi.

« Sur les 15 conciliations déposées par nos opposants, nous avons accepté à 13 reprises de refaire les élections, mais eux ne se sont pas mis d’accord avec nous, car ils savaient qu’ils allaient perdre », juge-t-il. Et poursuit : « Notre objectif c’est de décrocher la médaille d’or olympique. Là ils sont simplement en train de nous mettre des bâtons dans les roues. Ils veulent se payer une Fédération qui a le vent en poupe ». Hassane Sadok nous indique qu’il envisage de faire appel de cette décision (NDLR : il est précisé dans le rendu de la décision que celle-ci est exécutoire, de nouvelles élections devraient donc bien se tenir au cours des six prochains mois).

Au ministère des Sports, on explique suivre le dossier de près. « Le ministère procède actuellement à une expertise juridique pour déterminer précisément toutes les conséquences de cette décision et veillera à faire appliquer la décision du tribunal dans les meilleures conditions possibles pour la fédération, ses athlètes et ses pratiquants. » Car à un an des Jeux, c’est par la fédération, dont les élus ne sont théoriquement plus en place, que transitent notamment les aides aux sportifs dans le cadre de la préparation olympique.



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