Manche. Payer les artistes coûte de plus en plus cher aux organisateurs de festivals


Pour attirer les foules dans les festivals, il faut souvent débourser plusieurs centaines de milliers d’euros afin de programmer les plus grands artistes. Mais depuis quelques années, les organisateurs font face à un phénomène d’inflation sur leurs cachets.
Pour attirer les foules dans les festivals, il faut souvent débourser plusieurs centaines de milliers d’euros afin de programmer les plus grands artistes. Mais depuis quelques années, les organisateurs font face à un phénomène d’inflation sur leurs cachets. (©Jean-Paul BARBIER/La Presse de la Manche)

Fatboy Slim, Orelsan, Soprano… Une fois encore, Papillons de nuit, le plus grand festival de musique dans la Manche, promet des concerts mémorables le dernier week-end de ce mois de mai 2023. Mais à quel prix ?

Les artistes et surtout les tourneurs qui sont chargés de caler les dates de leurs tournées n’ont pas attendu la crise économique actuelle et l’inflation qui va avec pour augmenter les cachets. 

Cela dure depuis une dizaine d’années au moins. Mais je crois que c’est encore plus vrai ces derniers temps.

Louisa Weisbeckchargée de communication à Papillons de nuit

Résultat, les festivals organisés dans la Manche, très majoritairement associatifs, ont de plus en plus de mal à aligner une programmation attractive. « La courbe de l’inflation est clairement plus basse que celle des cachets », sourit Nicolas Picot, le président des Art’Zimutés, à Cherbourg.

Des choix à opérer dans les dépenses

« Depuis 2019, certains ont augmenté leurs tarifs de 40 %, passant quasiment du simple au double, sans réelle justification », renchérit la communication de Papillons de nuit. Ainsi en 2022, les cinq ou six têtes d’affiche du festival basé à Saint-Laurent-de-Cuves se sont partagé 90 % du budget alloué aux cachets des artistes.

Les programmateurs des associations organisatrices doivent donc faire des choix. « Le phénomène est d’autant plus vrai pour les artistes étrangers. Cette année par exemple, nous avons opté pour ne faire venir que Fatboy Slim », souligne Louisa Weisbeck.

Cette surenchère des cachets nous oblige à gratter partout ailleurs, sur tous les autres postes. Tous les quatre ou cinq ans, nous augmentons pourtant le budget destiné aux artistes d’environ 30 %. L’an dernier, la programmation était déjà plus faible faute de moyens. Nous avons donc revu le budget à la hausse cette année. Ce sont toujours des choix difficiles. On pourrait organiser un très bon festival, très qualitatif, avec des artistes moins célèbres, mais le public ne répondrait pas forcément présent. Il faut toujours penser à l’équilibre.

Nicolas Picot

« Et ça ne marche pas si une tête d’affiche bénéficie, à lui seul, d’un tiers du budget de la programmation », précise Louisa Weisbeck.

Du côté du festival Jazz sous les pommiers, le constat est le même, tout comme les solutions. « Nous rognons sur d’autres postes. Cette année, par exemple, nous avons arrêté d’envoyer la compilation de notre programmation sur CD. C’est davantage dans l’air du temps, et cela nous fait économiser quelques euros », résume Séverine Hédouin, la responsable communication.

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« Aujourd’hui, les concerts doivent être rentables pour les artistes »

Tous sont en tout cas vigilants à ne pas trop, voire pas du tout, hausser leurs tarifs. Mais l’équilibre budgétaire est parfois chancelant… Pour y remédier, Papillons de nuit semblent ainsi avoir trouvé une solution en s’unissant avec le festival Grandes Marées.

Nous nous sommes associés pour faire venir Juliette Armanet. Comme nous ne nous faisons pas d’ombre et que nous avons chacun notre public, cette union a permis d’obtenir un cachet plus intéressant. Tant pis en revanche pour l’exclusivité.

Louisa Weisbeck

Une pratique qui détonne dans le milieu des festivals. « Avec la multitude d’événements désormais organisés, il y a forcément davantage de concurrence, donc les prix augmentent… », résume Nicolas Picot.

D’autant que l’industrie de la musique a changé depuis plusieurs années. « Quand les CD se vendaient encore, c’est ça qui faisait vivre le monde de la musique, la tournée était surtout faite pour promouvoir l’album. Aujourd’hui, les concerts doivent être rentables pour les artistes », analyse encore le président des Art’Zimutés, qui l’avoue : « Ce sont quand même eux qui ramènent les foules ! »

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