« Oui, c’est une renaissance » : Fiona Ferro s’ouvre les portes du tableau principal de Roland-Garros


Il porte chance le court numéro 14. 24 heures après Lucas Pouille qui cette fois était en tribune pour encourager sa copine, Fiona Ferro s’est extirpée des trois tours de qualification pour se faire une place dans le tableau final de Roland-Garros. « C’est comme une renaissance » savoure la blonde de 26 ans. Le mot n’est pas trop fort. Il y a un an, en février 2022, Fiona Ferro a porté plainte contre son ancien entraîneur Pierre Bouteyre pour agression sexuelle et viol alors qu’elle avait entre 15 et 18 ans. L’entraîneur est mis en examen en août 2022.

« Je suis passée par énormément d’émotions ces derniers mois, pas toutes hyperpositives, confie la joueuse. Si on m’avait dit il y a quelques mois que j’allais me retrouver là, qualifiée pour le tableau final de Roland, j’aurais dit oui tout de suite. Partager ce moment avec ma famille, mes amis qui savent par quoi je suis passée, à deux pas de chez moi puisque j’habite juste à côté du stade, c’est fort, très fort en émotions. »

Le public, qui a encore rempli ce fameux court 14 où brillent les Françaises depuis le début de la semaine, l’a compris. Ferro a été encouragée, soutenue, aimée durant ces derniers matches et pas seulement pour son tennis. « Depuis quelques mois, raconte-t-elle sans évoquer l’affaire, j’essaie de relativiser les choses. Il y a plus grave dans la vie que perdre un point, un revers ou un coup droit sur un court. Je le sais. Même si je peux être dure envers moi-même, je me dis que ce n’est que du tennis. »

Cette histoire l’a détruite, forcément. Espoir du tennis tricolore, elle est montée jusqu’à la 39e place du classement WTA en 2020 s’offrant au passage, un 8e de finale à Roland-Garros la même année. Et puis son ancien entraîneur a tout cassé, sa vie et son tennis. Fiona Ferro est aujourd’hui classée à la 411e place mondiale, loin des standards d’une joueuse qui peut vivre de son sport. « C’est simple, dit-elle ce vendredi dans un sourire, depuis le début de l’année, jouer des tournois m’a coûté plus cher que cela m’a rapporté. J’ai été dans le rouge tout le temps. On peut rester à la 400e place mondiale mais pas trop longtemps… » Cette semaine, elle a aussi gagné au loto. Sa qualification dans le grand tableau lui assure une prime minimale de 69 000€ si elle se fait sortir au premier tour.

Pour finir sa semaine, Ferro a sorti l’Australienne Jaimee Fourlis 3/6, 6/2, 4/6. « Fourlis ne m’a rien donné, glisse Ferro. Moi j’étais tendue et j’ai perdu le fil du match au deuxième set avant de me remettre dedans dans le troisième. Je suis super heureuse. »

L’histoire a été tragique et douloureuse. Elle devient belle. Fiona Ferro est de retour dans le circuit même si tout n’est pas encore revenu : « Sur certains passages, j’ai l’impression que j’ai le même niveau que lorsque je jouais dans le Top 50. Mais à cette époque, j’étais plus stable, j’avais moins d’écart de niveau dans un même match. Si je veux, et je le veux, revenir le plus haut possible, je dois travailler ça ».

La page de l’agression sexuelle dont elle a été victime durant de trop longues années n’est pas fermée. Elle ne se fermera jamais et la cicatrice sera toujours là, douloureuse. Mais grâce à cette victoire sous un chaud soleil et devant les siens, Fiona Ferro peut commencer une autre vie. « C’était important de prouver à moi et aux autres que j’étais capable de rejouer au tennis à ce niveau là. Oui, pour moi c’est une renaissance. »

Fiona Ferro est la première Française à sortir par le haut du tournoi de qualification de Roland-Garros depuis 17 ans. La dernière fois, c’était en 2006 et les deux tricolores s’appelaient Virginie Pichet et Aravane Rezaï.



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