« Un bain de sang » : localisation des suspects, témoins, vidéosurveillance… où en est l’enquête sur le bal mortel de Crépol ?

Thomas, 16 ans, a perdu la vie alors qu’il était transporté en urgence vers un hôpital de Lyon dans la nuit de samedi à dimanche. L’adolescent a été mortellement blessé à l’arme blanche à Crépol (Drôme) lors d’un « bal d’hiver » au cours duquel une « rixe », selon les termes de Laurent de Caigny, procureur de Valence, a éclaté. Voici ce que l’on sait de l’enquête des gendarmes qui cherchent à retrouver les individus qui se sont présentés armés à cette fête, faisant un mort et huit blessés dont deux jeunes de 28 et 23 ans hospitalisés dans un état d’urgence absolue.
Ce que les enquêteurs ont appris de cette soirée
Au moins une dizaine d’individus se sont présentés, sans s’être inscrits au préalable, à cet événement organisé par le comité des fêtes de Crépol. C’est là qu’un incident aurait opposé une de ces personnes avec un des quatre agents de sécurité engagés pour cette soirée dont le prix d’entrée s’élevait à 4 euros. Il aurait alors « dégénéré en violence avec arme blanche, le vigile étant blessé, et la dizaine d’individus arrivés nuitamment formait alors un groupe hostile », selon le déroulé du procureur de la République Laurent de Caigny.
À l’intérieur, les convives « inscrits » entendent le raffut et viennent « au soutien des vigiles ». Une « rixe » éclate et l’affrontement se poursuit à l’extérieur de la salle des fêtes.
Marie-Laure Pezant, porte-parole de la gendarmerie se refusait ce mardi matin à employer le terme de « rixe » pour évoquer les faits. Selon elle, ce terme définit « deux groupes de jeunes qui ont décidé de prendre rendez-vous et de s’affronter, ici, on n’est pas dans cette configuration-là ».
Ce qu’ont vu les témoins
L’organisatrice de la fête, venue chercher son fils adolescent le soir des faits, raconte au Parisien être tombée sur une scène d’horreur : « Je vois un blessé sur une chaise à qui on fait un massage cardiaque (…) Je vais ensuite dans la cuisine et cette fois, c’est Thomas qui est par terre et qu’on essaie de sauver (…) Je n’arrêtais pas d’appeler les pompiers parce que plus le temps passait, plus on découvrait de nouveaux blessés. »

La mère de famille poursuit : « Dans les toilettes, un autre avait reçu un coup de couteau dans le dos. J’ai eu l’impression d’attendre longtemps les gendarmes. Tout le monde s’est réfugié dans la salle car on ne savait pas si les agresseurs nous attendaient encore dehors. Il y avait du sang partout. Partout. »
Un autre témoin décrit en effet « un bain de sang ». Selon son récit, « des jeunes de cité ont encerclé la salle des fêtes et plantaient les gens à l’aveugle. Le videur s’est fait trancher les doigts ».
Peut-être pas une « guerre de territoire »
Les premières rumeurs laissaient penser que les individus qui ont fait irruption au bal d’hiver provenaient d’un seul et même quartier, celui de la Monnaie, une cité de Romans-sur-Isère, à une vingtaine de kilomètres de là. Mais rien n’est moins sûr, tempère le procureur de la République de Valence.
VIDEO. « Ils plantaient les gens à l’aveugle » : ce que l’on sait des violences qui ont tué Thomas, 16 ans, dans la Drôme
« La précision du déroulé des faits doit permettre de mieux cerner le mobile de cette rixe, aux détours de laquelle un mineur qui ne faisait qu’aller au bal de sa commune a été tué. Au regard de ces avancées, il est cependant faux d’affirmer que le groupe hostile serait composé d’individus tous originaires de la même ville et du même quartier, explique Laurent de Caigny. Les liens qui peuvent exister entre les suspects possibles et en cours d’identification ne semblent pas reposer sur une telle logique de territoire. » « Il faut à ce stade rester prudent sur l’origine des agresseurs », ajoute pour notre journal une source proche de l’enquête.
Ce mardi matin sur franceinfo, la porte-parole de la gendarmerie a appelé les agresseurs à se faire connaître : « Ce serait plus raisonnable que les auteurs se présentent, parce qu’on ne va pas tarder à venir les chercher ». Selon la représentante, « il faut s’attendre à un progrès rapide et de probables interpellations ».
Des centaines d’auditions pour reconstituer la soirée
Pour reconstituer le cours des tragiques événements de samedi soir, les gendarmes sont en charge d’une enquête pour « homicide et tentatives en bande organisée ». Il leur faut entendre les plus de 450 personnes présentes à la soirée.
Cinquante de ces auditions avaient déjà été réalisées lundi après-midi. Les enquêteurs comptent aussi sur les souvenirs des convives pour identifier les auteurs de la « rixe ». « Des éléments concordants sont recueillis qui ciblent des suspects possibles et des techniques d’identification sont utilisées pour présenter aux témoins des planches de parade photographique », détaille le procureur. Objectif : identifier des « tenues », « signes distinctifs » et « comportements » singuliers.
Les gendarmes doivent aussi récupérer et analyser les images de vidéosurveillance, des caméras des commerces du village, tout comme les données liées aux relais téléphoniques du territoire de la commune. Il s’agira de décomposer minute par minute le fil de la soirée.