Crépol, un village dans l’incompréhension après la mort de Thomas




« Regardez comme le village est froid, on dirait que c’est la guerre, tout le monde reste chez soi », raconte un commerçant. Avec un petit peu plus de 500 habitants, le village de Crépol dans la Drôme est toujours sous le choc, deux jours après les événements qui ont endeuillé la fin du bal d’hiver organisé par le comité d’animation.
Devant la salle des fêtes, quelques jeunes viennent allumer des bougies rapidement éteintes par la pluie, en mémoire de Thomas, 16 ans, poignardé à mort, ainsi que de la dizaine de blessés dont deux toujours dans un état grave.

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Les caméras des chaînes de télévision ont fini par lever le pied. À la mairie, la maire préfère ne plus parler. Son premier adjoint, Jean-Claude Papeau s’excuse à travers une porte entre-ouverte de ne pas nous recevoir. « On ne sait rien de plus que ce qui est déjà dans la presse. C’est un village tranquille, tout le monde est choqué ». Tout juste assure-t-il qu’il ne voit aucun antécédent d’animosité ou de violences qui pourraient être un début d’explication.

« Crépol est un village calme, il n’y a jamais d’histoires »

La plupart des passants et des commerces refusent de répondre aux questions. « La seule chose que je vous dirai, c’est que ce n’était pas une rixe » souffle une épicière. Elle n’en dit pas plus, son patron, membre de la famille de la victime et les yeux embués de larmes, nous demande de partir. « Quand j’entends toutes les conneries qui sont dites, les propos qui sont déformés juste pour faire de l’audience… Si vous voulez de vraies infos, allez voir les gendarmes ! Il ne faut pas écouter les gens qui n’étaient même pas toujours à la soirée et qui vont dire n’importe quoi. Il faut faire confiance à la justice » explique-t-il, la voix pleine de tristesse en nous indiquant la sortie.

Plusieurs villageois sont remontés contre le terme de « rixe », utilisé par le procureur de la République, pour décrire les faits, ce qui ferait penser à une bagarre de fin de soirée qui aurait dégénéré. « Ils sont arrivés juste avant la fin de la soirée, avec des couteaux, ce n’était pas pour danser ! » s’emporte l’un d’eux, qui a vu dans les événements « une attaque organisée ». Installé depuis quelques années avec sa compagne dans le village, il jure que « rien n’aurait pu permettre d’imaginer un truc comme ça, c’est un village calme. Il n’y a jamais d’histoires ».

Sa compagne résume en quelques mots son état d’esprit : « tristesse, sidération, colère… Ma fille m’a demandé si quand elle serait grande, elle pourra aller au bal, ou s’il y aura des gens qui voudront la tuer. » Pour elle, rien ne sera plus jamais pareil. « Au prochain bal, les chasseurs du coin vont vouloir venir avec leurs fusils… S’il y a à nouveau un bal ! Mais j’espère bien qu’il y en aura, il ne manquerait plus qu’on parte et qu’on arrête d’aller au bal ». Elle en veut « aux politiques qui passent leur temps à stigmatiser et en profitent pour jeter de l’huile sur le feu » et s’inquiète « on est un petit village de campagne, il y a déjà bien assez de préjugés et de racisme comme ça. Les gens ont peur de ce qu’ils ne connaissent pas… »

L’auteur présumé des coups mortels sur Thomas interpellé

Un autre villageois refuse de nous répondre : « Je connais bien le père de la victime. Si je vous répondais, ce serait tellement méchant que vous ne pourriez pas l’écrire… La seule chose que je peux dire, c’est pour tirer mon chapeau aux 4 vigiles. Ils ont sauvé des vies ». Malgré les circonstances, la plupart des habitants prennent le temps de nous répondre, sans pour autant se livrer à trop d’extrapolations. L’hypothèse d’une vendetta ciblant une personne présente à la soirée a été évoquée par certains témoins dans la presse, mais elle ne convainc pas. « Ils n’ont pas voulu être fouillés, alors les vigiles ne les ont pas laissé entrer et ils ont sorti les couteaux » croit savoir un habitant, dont la fille était à la soirée, ce qui semble être la piste privilégiée selon le communiqué diffusé lundi soir par le procureur de la République de Valence.

À LIRE AUSSI Rixe mortelle à Crépol : Gérald Darmanin dénonce un « ensauvagement » Aucun habitant rencontré n’a connaissance d’un quelconque précédent, encore moins avec des jeunes du quartier populaire le plus proche, celui de la Monnaie, à Romans, situé à une vingtaine de minutes en voiture. Le Procureur a d’ailleurs rapidement précisé qu’il serait « faux d’affirmer que le groupe hostile serait composé d’individus tous originaires de la même ville et du même quartier ».

L’enquête a semble-t-il progressé rapidement, puisque le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé mardi après-midi l’arrestation de 7 suspects, dont l’auteur présumé des coups mortels sur Thomas. L’interpellation a eu lieu dans la région de Toulouse, les individus étaient suspectés de vouloir fuir en Espagne. Une marche blanche se déroulera mercredi au départ du lycée où était scolarisé Thomas, à Romans, et finira par un temps de recueillement au stade Albert-Donnadieu, où il jouait au rugby avec le club du RC Romans-Péages.




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