Des députés au chevet des « oubliés de la retraite »


Publié le 14 déc. 2022 à 7:04

« Les oubliés de la retraite » ont des raisons d’espérer. A l’approche de la présentation par le gouvernement de sa réforme des retraites , des députés souhaitent mettre sur la table le sujet des « travaux d’utilité collective » afin de permettre à ceux qui les ont réalisés dans les années 1980, d’en bénéficier dans le calcul de leurs droits à la retraite.

« On est dans une situation d’injustice », défend le député du Nord Paul Christophe (Horizons), qui doit présenter mercredi en commission à l’Assemblée les résultats d’une « mission flash » sur ces contrats. Créés par le gouvernement de Laurent Fabius en 1984, les TUC ayant duré jusqu’en 1990 devaient permettre de réduire le chômage des jeunes en les faisant travailler dans des associations, des collectivités, etc.

« Un vrai travail »

« Une belle arnaque », grince aujourd’hui Yves Coussement, qui avait réalisé l’un de ces TUC au sein d’une association gérant des colonies de vacances à la montagne. Aujourd’hui âgé de 62 ans, ce porte-parole de l’association « TUC, les oubliés de la retraite » a réalisé que son expérience ne lui avait pas permis de « valider des trimestres ». « Si je pars maintenant, il me manque huit trimestres, cela me ferait 250 euros en moins sur ma retraite », note-t-il.

Comme lui, les autres personnes recrutées en TUC, considérées à l’époque comme stagiaires de la formation professionnelle, ne peuvent pas faire valoir cette expérience pour leur retraite. L’Etat prenait bien en charge leur protection sociale, mais les dispositions de l’époque ne permettaient pas d’acquérir des droits à la retraite avec une rémunération faible et un temps partiel comme dans le cas des TUC.

Les travailleurs en TUC « ont effectué un vrai travail pour une faible indemnisation et ont été privés des acquis dont ils auraient pu bénéficier si finalement ils étaient restés chômeurs pour une partie d’entre eux », relève Paul Christophe, qui a travaillé sur le sujet avec le député socialiste, Arthur Delaporte.

L’Etat et le gouvernement ont déjà été plusieurs fois interpellés à ce propos par des parlementaires. Depuis 2014, des changements ont été apportés pour permettre à des salariés ayant été embauchés pour des temps partiels courts et faiblement rémunérés d’acquérir des trimestres. Mais ces dispositions ne sont pas rétroactives. Une application au bénéfice des TUC nécessiterait donc une évolution législative.

Récupérer des trimestres

La mission présentée en commission mercredi doit justement déboucher sur une proposition de loi. L’initiative est une « main tendue pour que le gouvernement se saisisse du sujet via une réforme des retraites », souligne Paul Christophe. L’idée serait de permettre aux personnes concernées de récupérer autant de trimestres que si elles avaient été au chômage (un trimestre pour 50 jours de « stage »). « Ce serait pour nous la bonne solution », réagit Yves Coussement de l’association TUC, les oubliés de la retraite.

Evaluer précisément le nombre de personnes concernées n’est pas évident. Paul Christophe et Arthur Delaporte estiment à environ 1 million, les victimes de l’absence de prise en compte de leur Tuc.

Contrairement à une proposition de loi déposée fin novembre sur le sujet par le sénateur divers droite du Nord Jean-Pierre Decool, la proposition des députés de la commission des Affaires sociales ne devrait pas cibler seulement les TUC mais tous les dispositifs similaires déployés entre 1977 et 1992 (les stages jeunes volontaires, les programmes d’insertion locale, les stages d’initiation à la vie professionnelle).

Le nombre de personnes concernées est difficile à quantifier et les bénéficiaires des dispositifs les plus anciens sont déjà en retraite. Toutefois, englober tous les contrats similaires permettrait d’éviter de proposer un système inconstitutionnel.

Permettre à ces Français d’acquérir des trimestres pour leur retraite pourrait coûter entre 350 millions et 3,5 milliard d’euros. Avec un taux de recours vu comme probable autour de 40 %, le coût serait autour de 1,4 milliard.



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