En Allemagne, la pénurie de logements menace de doubler d’ici 2025


Publié le 14 févr. 2023 à 17:54Mis à jour le 14 févr. 2023 à 17:55

Pour son vingtième anniversaire, l’humeur du conseil des sages allemands de l’immobilier était lugubre. « Sur le marché résidentiel, il n’est hélas plus minuit moins cinq, il est trois heures et quart, la situation est grave », a résumé mardi Andreas Mattner, le président du Comité central de l’immobilier (ZIA) qui publie le rapport des cinq experts. Le fragile équilibre qui avait été trouvé en 2020 entre l’offre et la demande en immobilier résidentiel, a été chahuté par la pandémie puis balayé par la guerre en Ukraine.

L’afflux de 1,1 million de réfugiés a créé un besoin supplémentaire de 200.000 logements selon les sages, mais il manquait au total 320.000 logements l’an passé. Et selon Andreas Mattner, la pénurie ne va faire que s’accentuer : elle devrait atteindre 700.000 unités en 2025. « En 2023, c’est l’équivalent de la ville de Brême qui sera sans logis, en 2024 la pénurie équivaudra à la Sarre dans son entier », anticipe le président du ZIA.

Les projets ne sont plus rentables

Pour juguler l’inflation, la hausse des taux d’intérêt décidée par la Banque centrale européenne est en effet venue durcir une situation déjà compliquée par les problèmes d’approvisionnement en matériaux de construction et la crise énergétique. La flambée des prix conjuguée avec un renchérissement des conditions de financement a fait basculer en territoire négatif la rentabilité des projets immobiliers.

« Les investissements dans la construction, qui constituaient jusqu’à présent l’un des principaux piliers de l’économie, ont connu un recul de plus de 1,4 % en termes réels en 2022 », écrivent les sages. Ce n’est qu’un début car les sages s’attendent à une baisse de 2,5 % des investissements cette année. Vonovia, le premier groupe immobilier en Allemagne a d’ailleurs annoncé dès la fin janvier l’arrêt de tous ses projets de construction pour 2023.

Dans ces conditions, la ministre du logement Klara Geywitz a dû reconnaître que l’objectif du gouvernement de construire 400.000 logements par an ne serait pas atteint avant 2024. Compte tenu des délais de constructions, les sages sont plus pessimistes. Ils estiment que « les défis liés à l’augmentation des coûts de construction se traduiront principalement à partir de 2024 par une baisse des autorisations et des nouveaux chantiers ».

Assouplir les règles de construction

Pour rompre ce cercle vicieux, les sages plaident pour une simplification des procédures d’autorisation, une harmonisation des règles entre régions et un coup de pouce fiscal à l’investissement. Pour l’élue libérale Sandra Weeser, présidente de la Commission Logement au Bundestag, la flexibilité est essentielle : « Nous devons assouplir les règles afin d’augmenter la hauteur des immeubles ou de pouvoir transformer des surfaces commerciales en habitations ».

Selon elle il est aussi temps de résoudre le conflit entre objectifs climatiques et immobiliers. « Pour chaque nouveau règlement et loi, nous devons faire un calcul honnête des coûts et des bénéfices », estime Sandra Weeser. Elle critique les conditions d’accès à l’enveloppe de 1,1 milliard d’euros ciblant les bâtiments les plus efficaces énergétiquement. « Ces conditions coûtent beaucoup d’argent sans être efficaces. Mieux vaudrait considérer l’impact environnemental global d’un bâtiment », précise-t-elle.

En attendant, la pénurie de logements fait monter les prix. Les loyers ont augmenté de 5,2 % l’an dernier à 9,10 euros par mètre carré, contre 3,7 % en 2021. Les prix d’acquisition des appartements ont, eux, bondi de 7,8 % en 2022, à 3.324 euros par mètre carré. Les experts n’anticipent cependant pas de bulle mais une correction du fait de la forte hausse des taux. Dans les sept plus grandes villes, les prix ont d’ailleurs baissé entre le deuxième et le quatrième trimestre l’année dernière.



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