La grande envolée des dépenses de médicaments


Le coût des médicaments pour la Sécurité sociale progresse à grande vitesse en dépit des mesures censées contenir la facture. Les dépenses de médicaments remboursés ont augmenté de plus de 4 % entre 2021 et 2022, selon des documents budgétaires publiés récemment.

Cette évolution « est supérieure à la dynamique historique des dépenses de médicaments remboursés », souligne une annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la Sécurité sociale, discuté à l’Assemblée la semaine prochaine.

Après des années marquées par « de faibles innovations thérapeutiques et une substitution croissante de génériques », la facture du remboursement des médicaments a commencé à gonfler autour de 2017, « avec l’entrée sur le marché de nouvelles molécules innovantes », analyse l’annexe au projet de loi.

Promesses d’investissements

Cette dynamique a connu « une nouvelle accélération » après la crise sanitaire qui a poussé le gouvernement à promettre d’investir dans la santé. Désireux d’encourager les projets de relocalisation industriels des laboratoires, il a promis de laisser le budget consacré aux médicaments augmenter de 2,4 % par an.

Un objectif largement dépassé entre 2021 et 2022, où l’enveloppe budgétaire a crû de 4,1 % pour atteindre 27,8 milliards d’euros.

Pas de quoi satisfaire les industriels pour autant. Ceux-ci disent faire face à l’inflation de leurs coûts qui pèse sur leurs marges. Et s’insurgent contre les mécanismes censés réguler le coût des remboursements de médicaments pour la « Sécu » (baisses de prix, remises etc.).

« Explosion » des prélèvements

Les documents budgétaires montrent que ces mécanismes ont joué à plein l’an dernier. En particulier ladite « clause de sauvegarde ». Ce prélèvement, effectué sur le chiffre d’affaires des laboratoires quand il dépasse un certain seuil, est passé de 700 millions en 2021 à 1,1 milliard d’euros en 2022.

« Les chiffres 2022 sont encore une estimation, cependant la clause de sauvegarde explose – et explosera encore plus en 2023. Désormais, c’est une taxe massive », déclare Philippe Lamoureux, directeur général du Leem, le lobby des entreprises du médicament. « Il y a une vague d’innovations sans précédent et la régulation budgétaire ne tient absolument pas compte des besoins de financements du secteur ».

La régulation des prix en question

La grogne des industriels trouve de l’écho à Bercy. « Il y a un sujet de régulation du prix », a déclaré le ministre délégué en charge de l’Industrie, Roland Lescure, devant des sénateurs jeudi, évoquant des « modes de régulation en France clairement inefficients ».

« Le fait qu’un industriel puisse entrer dans une année en se disant je sais à peu près combien je vendrai le produit mais je ne sais pas combien je vais gagner parce que derrière on va m’en prendre une partie […], c’est extrêmement désastreux d’un point de vue de la capacité d’un industriel à se projeter », a poursuivi le ministre.

Equation compliquée

En début d’année, le gouvernement a chargé un panel d’experts de l’industrie de la santé de « réinterroger » le modèle de financement des médicaments . Leurs conclusions sont attendues d’ici au début de l’été.

A l’heure des pénuries de médicaments, l’exécutif souhaite encourager les relocalisations industrielles et l’innovation. Il veut aussi maîtriser les coûts pour la collectivité sans mégoter sur la santé des Français. Une équation compliquée à résoudre à laquelle il va devoir se confronter rapidement en préparant le prochain budget de la Sécurité sociale.



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